En vacances en Corse, Madeleine et Antoine, étudiant(e)s brillant(e)s en pleine révision du concours de l’ENA, sont confrontés à un drame qui met à l’épreuve leur amour et leur engagement politique…
Si l’on a pu découvrir l’intérêt de Sylvain Desclous pour la politique à travers son documentaire La Campagne de France, c’est en réalité un milieu qu’il connaît depuis longtemps puisqu’il a été étudiant en sciences politiques. C’est tout naturellement qu’il choisit ce cadre pour y placer un jeune couple confronté à un drame qui vient ébranler toutes ses certitudes, à la fois d’ordre privé et professionnel, les deux restants intimement liés.
Le drame emprunte son titre à Dickens, mais aurait pu tout aussi bien aller chercher chez Jean-Paul Sartre tant il est question de la possibilité ou non de s’investir en politique sans se salir les mains, allant jusqu’à l’illustrer par un plan sur les paumes grattant la terre des protagonistes.
Dans une atmosphère tendue qui voit les relations entre les personnages muer du tout au tout, et interroge le lien entre nos idéaux et nos émotions les plus primaires, la droitisation accompagnant l’apprentissage de la peur et l’impossible aveu de la lâcheté, Antoine et Madeleine sont chacun(e) forcé(e) de se souvenir d’où il/elle viennent et symétriquement lancent un appel au secours à leur père respectif en temps de crise.
Pour donner vie à ces personnages pétris de contradictions, chez lesquels les mains les plus sales peuvent accompagner le cœur le plus pur, le cinéaste s’est offert une affiche de choix, réunissant pour la première fois à l’écran le couple le plus brillant du cinéma français, Rebecca Marder (dont l’éclosion continue après Une jeune fille qui va bien, Les Goûts et les couleurs, et récemment La Grande Magie et Mon Crime) et Benjamin Lavernhe. Il y ajoute des seconds rôles jamais en reste, à commencer par Emmanuelle Bercot en ancienne ministre qu’une jeune conseillère idéaliste ramène à ses convictions, et un Marc Barbé très intense en père bien conscient d’embarrasser sa fille transfuge de classe.
Passionnant dans son écriture, surprenant jusqu’au bout, porté par des interprétations intenses et une musique qui met les nerfs à vif, De grandes espérances dresse le portrait d’une société où c’est toujours par la faiblesse des hommes que les grandes femmes risquent d’être détournées de leur destin, et se présente comme le film politique le plus captivant de ces dernières années.
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