« Stella est amoureuse », passe ton bac après

En rentrant de vacances avec ses copines du lycée, Stella découvre que son père a quitté sa mère et que celle-ci va devoir vendre le café. Entraînée en boîte par une camarade, elle est fascinée par André, un très bon danseur…

14 ans après Stella, le film autobiographique évoquant son enfance, Sylvie Verheyde revient avec une suite imprévue, Stella est amoureuse. On pourrait croire que tout est dans le titre, mais pas tellement. Si la vie sentimentale de la lycéenne prend une place importante, construite de manière pyramidale entre deux périodes de vacances estivales en Italie, avec au centre la rencontre d’André, en boîte de nuit, on suit également l’évolution de ses rapports avec son groupe de copines, toujours constitué de sa meilleure amie Gladys mais étoffé depuis, de sa situation familiale avec la séparation de ses parents et le retour brûlant de sa conscience de ne pas faire partie de la même classe sociale que son entourage à l’approche du baccalauréat et des choix d’orientation.

Dans le rôle-titre, la petite Léora Barbara a été remplacée par Flavie Delangle, notamment vue dans la série Skam France. Double physique aux yeux bruns d’Anamaria Vartolomei, la jeune actrice fait preuve d’un même charisme magnétique, capital pour nous attacher à son personnage dont le silence, la difficulté à parler de ses sentiments et la crainte de faire paraître à chaque instant son origine sociale contribuent à créer une aura de mystère. C’est ce qui attire l’attention d’André (le musicien Dixon, passé par la Nouvelle Star), considéré comme le roi des Bains Douches. La réalisatrice reconstitue, en plein deuxième confinement, l’atmosphère électrique de la boîte de nuit culte dans les années 80, à grands coups de tubes de l’époque (Last night the DJ saved my life, Un autre monde…), grâce à une reconstitution soignée des tenues (on a envie d’adopter tout le dressing de Stella), un beau travail de lumière et de colorimétrie qui magnifie les visages et les corps agités par la danse et fait varier l’ambiance à mesure de l’évolution des rapports entre les personnages. En plan-séquence, Stella se faufile dans le monde de la nuit où elle se sent d’emblée plus à l’aise que dans ses journées de lycéenne. Hermétique à l’alcool et aux drogues pour en avoir trop perçu les effets auprès des clients de ses parents, la jeune fille n’a pourtant pas peur de la faune nocturne, pas plus que d’assumer son corps sur la piste. 17 ans, c’est l’âge où tout se décale : à mesure qu’elle prend du retard dans le programme scolaire, creusant l’écart avec ses brillantes camarades promises à des études supérieures prestigieuses, Stella s’avance dans un monde d’adultes, à la fois par ses expériences en boîte, l’univers artistique auquel André l’initie et la nécessité de travailler le week-end avec sa mère dans un restaurant.

Marina Foïs a pris la place de Karole Rocher dont elle conserve l’esprit du personnage, celui d’une femme qui compense son manque d’atouts initial dans la vie par une capacité à faire avec les circonstances et à chaparder au quotidien qu’elle présente comme « un tas de merde » tous les petits plaisirs qui se présentent, indépendamment de ce qui se fait ou non. À mesure que la figure paternelle s’efface dans la distance, le personnage de Benjamin Biolay devenant presque anecdotique dans ce second volet, l’histoire de Stella devient celle d’une transmission féminine d’un appétit de vie et d’une forme d’ambition non normée.

Variant les humeurs sans temps mort, ce qui en soi reflète bien l’âge adolescent, alignant aussi bien les plans chaotiques à l’épaule que des scènes au cadrage extrêmement construit et à l’esthétique léchée, Stella est amoureuse colle par sa forme à son sujet, nous offre le plaisir de retrouver cette petite héroïne capable de s’arracher au déterminisme et l’envie de savoir la suite de son destin.

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