Le sergent Howie reçoit une lettre signalant la disparition d’une adolescente, Rowan, sur une île des Hébrides. Mais lorsqu’il débarque, les habitant(e)s lui indiquent ne pas reconnaître la jeune fille de la photo…
Challenge 12 mois – octobre – conseillé par JudeMelon
En cette Spooky Season, quoi de mieux que se replonger dans un classique d’un sous-genre de l’horreur ? En effet, ce film qui se présente d’abord sous l’aspect d’un thriller, voire d’un polar, avec une enquête classique menée par un policier pour retrouver une adolescente disparue, bascule progressivement vers les prémices de la folk horror (dont l’un des exemples les plus récents reste Midsommar, très largement inspiré par la scène de fin de The Wicker Man).
Adaptant Ritual de David Pinner, le romancer et dramaturge Anthony Shaffer, qui a déjà à l’époque écrit les scénarii de Frenzy et du Limier, s’associe avec Robin Hardy dont The Wicker Man est la première réalisation, et restera la seule œuvre notoire (il a voulu renouer avec le succès des années plus tard avec The Wicker Tree, dérivé de son film à succès). Après quelques atermoiements, le scénariste obtient que le rôle principal du policier soit tenu par l’acteur de série Edward Woodward, qu’il avait en tête. Quant à Christopher Lee, enchanté de sortir un peu de ses rôles de vampire de la Hammer, il se vantait d’avoir participé gratuitement à ce film au budget limité qu’il a considéré comme le meilleur de sa carrière.
Suivant le schéma classique de l’étranger qui pénètre dans un nouveau milieu où il découvre de nouveaux éléments qui le surprennent, nous découvrons à mesure de l’avancée de l’enquête toutes les particularités des habitant(e)s de l’île de Summerisle. D’abord, le sens du collectif : très souvent présenté(e)s en groupe, quel que soit le lieu, les habitant(e)s laissent peu d’opportunités à l’inspecteur de les interroger séparément, semblant toujours faire bloc pour lui barrer le passage, depuis son arrivée. Ce mouvement collectif devient évidemment facilement une opposition et une force, mais c’est aussi l’occasion de faire du long-métrage une sorte de comédie musicale, car dès qu’ils/elles sont rassemblé(e)s, les habitant(e)s ont tendance à se mettre à chanter. Au début de façon assez innocente et crédible lors d’une soirée au bar, mais à mesure que le film avance, les chansons deviennent de plus en plus étranges et prennent la forme d’un rituel transmis de génération en génération (notamment lors de la comptine « and on the bed there was a girl… »). C’est scènes musicales contribuent à une ambiance qui oscille entre comique et angoisse. Plusieurs scènes sont aujourd’hui très drôles à regarder, a fortiori lorsque commencent les célébrations du 1er mai et que tout le monde est déguisé. Mais dans le même temps, la construction du scénario contribue à faire monter la tension et à nous laisser penser que le pire est à venir.
Au-delà de l’enquête et de ses rebondissements, qui suffirait à tenir en haleine honnêtement les spectateurs/trices, et de la très impressionnante scène finale, dont l’alternance des points de vue en plongée/contre-plongée exacerbe l’ampleur, le long-métrage propose une réflexion passionnante sur l’opposition des cultures et en particulier religieuses. L’inspecteur venu du continent est un catholique fervent, très choqué par les pratiques païennes locales et qui se réserve pour le mariage. Sur l’île, le catholicisme des générations antérieures a cédé la place à une religion polythéiste davantage calquée sur le cycle de la nature, où la nudité et la sexualité ne sont pas perçues comme des péchés mais comme des éléments naturels en lien avec la fécondité et la fertilité, des valeurs enseignées aux enfants et promues par la communauté. Peu à peu l’enquête policière rejoint le sujet de cette opposition de deux systèmes de valeurs dans une réflexion passionnante et un aboutissement presque aussi divertissant que choquant.
Un film que j’apprécie, que ce soit la version de 1973 ou celle de 2006. La première fois que je l’ai, il me semble que c’était la version de 2006 (un fan de Nicolas Cage me l’avait conseillé) et j’ai été surprise par le final !
Je n’ai pas vu le remake mais c’est sûr qu’on peut se faire bien avoir par la fin !