La plume
Pour Louan, le cinéma, c’est un métier. Mais l’exploitant venu du Nord multiplie les projets : il est aussi rédac’chef du site Cquoilecinéma et créateur du podcast Cquoilecinémois. Pour cette rubrique, il a choisi le film d’un cinéaste à son image : audacieux, cash et entier.
L’œuvre
Bien que le mouvement de la danse soit un moyen d’expression et de libération personnelle, une soirée en boîte de nuit n’est qu’un simple enchaînement de mouvements. Bien que votre esprit soit momentanément laissé de côté pendant la procédure de possession par le biais de pulsations musicales, vous ne perdez pas tout contrôle, même si vous l’espérez – car perdre tout contrôle serait tout à fait terrifiant. Pourtant, pour le réalisateur Gaspar Noé, le fait de perdre tout contrôle et de voir jusqu’où va la dépravation humaine dans ces moments de pure impuissance est exactement ce qu’il aime le plus mettre sur grand écran.
Dans Climax, l’avant-dernier long de Noé, c’est le club qui devient fou. En suivant une troupe de danseurs lors de leur dernière soirée avant de quitter la France pour l’Amérique et d’embarquer pour une tournée, ces jeunes danseurs – qui ont chacun leur propre histoire entre eux – se lâchent et se font droguer sans le savoir par un bol de sangria laissé sans surveillance. Le tout est accompagné d’une bande sonore aux basses profondes et floues qui vibrent à travers les murs (Justice et Daft Punk parmi les morceaux choisis). Les pulsions de plaisir deviennent inéluctables et horribles, transformant tout le monde (y compris Sofia Boutella) en leur être le plus impuissant, animal et amoral, pour une expérience de maison hantée au sein d’une piste de danse démoniaque.
Si vous ne le saviez pas encore, Climax n’est pas censuré, ce que vous devez absolument savoir avant de le regarder. Si le visionnage d’un film de Gaspar Noé (c’est également lui qui est à l’origine d’Enter the Void ou d’Irréversible) peut s’avérer être une véritable torture, il s’agit également d’un regard sans complaisance sur ce qui peut être considéré comme une analyse du comportement humain. Le sexe, la drogue et la violence graphique (et parfois les trois en même temps) sont portés à leur paroxysme, poussant l’individu à dépasser son sens rationnel pour atteindre l’impuissance et la dépravation. Si le dernier film de Noé, Love, a choqué le public, il l’a fait par sa sentimentalité. Dans Climax, c’est un retour à une forme diabolique qui fait tourner la tête du début à la fin.
Si vous n’avez pas encore été convaincu (et j’espère que ce n’est pas le cas), j’insiste sur le fait qu’il y a tant de choses à aimer dans Climax, et certainement autant de choses qui montrent à quel point Noé est un cinéaste talentueux : une compilation d’interviews en plan fixe ouvre le film, suivie d’un numéro de danse chorégraphié (tourné en plan séquence, l’un des moments forts du film), ainsi que le générique de fin au néon stroboscopique, sa marque de fabrique. Climax n’est pas pour les âmes sensibles. Et ce n’est certainement pas seulement pour les fans de musique ou de danse, mais aussi pour ceux qui prennent des risques et veulent être complètement dérangés et choqués. C’est une expérience intense, tordue et sombre. Et parfois, c’est exactement ce que vous souhaitez.
Louan N.
Je ne l’ai pas vu. Je ne suis pas du tout une adepte du cinéma de Gaspar Noé, mais ton article m’a presque donné envie d’aller voir, il a l’air très esthétique, ça m’intrigue