« Batman Begins »/« The Dark Knight »/« The Dark Knight Rises » : story of Gotham

Dévasté par la criminalité qui règne dans la ville de Gotham depuis l’assassinat de ses parents alors qu’il était enfant, le milliardaire Bruce Wayne tente d’aller s’endurcir aux côtés des prisonniers des confins du monde. Formé par un maître en arts martiaux, il revient comme justicier…

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Lorsque la Warner décide de relancer la franchise Batman, largement en perte de vitesse avec les deux films de Joel Schumacher, le mercato de réalisateurs finit par profiter à Christopher Nolan. Le cinéaste s’entoure de son frère Jonathan et du scénariste David S. Goyer, et prévoit d’emblée une trilogie, dont les détails des intrigues seront remaniés au fil du temps.

Après avoir envisagé un Batman sur le retour incarné par Clint Eastwood, il est finalement décidé que le premier opus s’engagerait dans la voie de l’origin story, nécessitant donc une figure relativement jeune. C’est Christian Bale qui endosse le costume, largement revisité par rapport à celui des films précédents. Globalement, l’ambition de Nolan s’éloigne largement de l’esthétique gothique de Burton. Son modèle, c’est Blade Runner, avec son univers visuel urbain, noir et futuriste. C’est ainsi qu’il conçoit Gotham qui petit à petit se révèle comme l’enjeu, voire le personnage central de ce récit en trois actes.

En effet, plus que son histoire personnelle, qui prenait une place clé dans les films de Burton, puisque la confrontation avec le Joker revenait à venger la mort de ses parents, c’est ici le rapport de Bruce Wayne à sa ville qui est largement exploité au cours des trois volets. Inspiré tout de même par la figure paternelle, dont les innovations techniques visaient à améliorer la qualité de vie des concitoyens, à l’instar de ses moyens de transport, le jeune Bruce est désespéré de voir ces infrastructures à l’abandon et la criminalité remonter en flèche. Il est fort appréciable de voir développer les raisons pour lesquelles l’homme choisit de s’impliquer de cette façon dans la vie de Gotham, d’une manière finalement assez politique. Le premier film garde encore quelque chose de relativement individuel autour de son personnage, notamment grâce aux flashbacks de son enfance, à sa relation avec Alfred (touchant Michael Caine), puis à celle qui se construit avec Rachel. Ce personnage féminin qui n’est pas réduit à son statut de love interest, mais perçu comme une adjuvante qui poursuit ses propres objectifs de justice, est malheureusement sabordé dans le deuxième volet par un changement impromptu de visage. Alors qu’on avait pu s’attacher à ce que proposait Katie Holmes, Maggie Gyllenhaal se voit dotée d’une partition moins flatteuse, qui réduit la part de libre-arbitre et d’investissement de son personnage et la cantonne en grande partie à l’objet des vœux de deux hommes, rivaux en dépit de leur apparente amitié. Il faut dire qu’Harvey Dent (Aaron Eckhart) ne semble jamais vraiment sincère, et que son look trop propre sur lui il lui donne un soupçon d’hypocrisie qui rend son retournement assez prévisible.

Le méchant qui a le plus fait parler de lui dans cette trilogie, c’est Heath Ledger en Joker. Un personnage qui s’éloigne largement de la version de Jack Nicholson, refusant totalement de lui chercher des explications psychologiques du côté de la cause de sa défiguration, pour laquelle il invente autant d’histoire que d’interlocuteurs/trices, présentant au final ses cicatrices comme un non-sujet, comme s’il ne fallait surtout pas chercher une humanité bafouée dans ce personnage, mais en faire un symbole, une incarnation du mal absolu, faisant du duel avec Batman une pure opposition théorique de valeurs. C’est à la fois la force et le défaut de l’écriture de Nolan : l’histoire de Gotham se déploie dans la durée, avec une forte composante politique et sociologique, une critique des enjeux capitalistes plus poussée que chez Burton, une analyse des comportements humains à grande échelle qui culmine avec le dilemme des bateaux piégés, sans doute le passage le plus intéressant de la trilogie d’un point de vue intellectuel. On reconnaît bien là la patte du réalisateur, qui cherche à faire des films intelligents mais aussi visuellement spectaculaires, quitte à en faire des tonnes. Exit la Batmobile racée, place à un tank militaire capable aussi bien de voler que de traverser tous les obstacles. Ça explose de partout, et ça finit par lasser, à force de surenchère.

À l’inverse, plus le film théorise l’opposition du bien et du mal, des bien-nés et des précaires, plus il s’embarque dans des scènes à grand spectacle, plus il perd en humanité et en émotions, désincarnant peu à peu tous ses personnages pour en faire les purs avatars des idées qu’ils représentent. Le troisième volet est tout entier gangrené par cette vision, et ne parvient à retrouver un semblant d’émotion que dans son dernier quart d’heure, en grande partie grâce à Michael Caine et Joseph Gordon-Levitt. Ses personnages féminins, dont l’écriture semble avoir été expédiée, manquent du piquant et de la folie de la Catwoman de Michelle Pfeiffer. À force de vouloir tout faire noir et futuriste, l’ensemble est carencé visuellement de relief, de couleur, de détails saillants, et perd également au fur et à mesure l’humour qu’on avait pu apprécier dans les précédentes adaptations. Pour autant, la narration reste relativement captivante, et l’expérience intellectuelle vaut le coup.

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2 commentaires sur “« Batman Begins »/« The Dark Knight »/« The Dark Knight Rises » : story of Gotham

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  1. J’avoue qu’à part The Dark Knight grâce au jeu d’Heath Ledger, je n’ai pas franchement accroché aux deux autres opus, le troisième m’ayant même carrément ennuyée. Je leur préfère globalement ceux de Tim Burton (qui me semblent pourtant souvent critiqués) à la fois sombres et colorés (en tout cas pour le premier), non dénués d’humour.

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