« L’Extraordinaire Voyage de Marona » : la meilleure amie des humains

D’abord, elle s’appelle Neuf, parce qu’elle est le neuvième chiot de sa portée. Mais rapidement, elle est adoptée par un humain acrobate qui la rebaptise Ana…

Challenge 12 mois – avril – conseillé par Nanoushkah

Voilà un film comme une affaire de famille : la cinéaste roumaine Anca Damian, qui s’est déjà plusieurs fois essayée à employer l’animation pour retranscrire un parcours de vie, travaille ici avec son fils, l’acteur Anghel Damian, au scénario. Leur Extraordinaire Voyage a fait le tour des festivals, plusieurs fois récompensé, notamment à celui du film fantastique de Strasbourg.

Il faut dire que l’œuvre est singulière, à la fois dans son intrigue et dans son style visuel. Fait assez rare pour un film d’animation, celui-ci commence par la fin de son intrigue, une fin tragique, de l’ordre de celles qu’on voudrait épargner de découvrir aux enfants. Même si la mort est parfois abordée avec les petit(e)s, c’est souvent par le biais d’un personnage secondaire (comme dans Bambi ou Le Roi Lion), mais la cinéaste prend ici un risque majeur en présentant d’emblée son personnage principal aux portes de la mort. Renversée par une voiture, Marona, la petite chienne, indique tout de suite en voix off que ce à quoi on va assister est le déroulé de sa vie qu’elle repasse avant son dernier souffle.

Comment faire pour ne pas sombrer d’emblée dans la mélancolie après cette annonce ? C’est là qu’intervient le travail créatif de l’équipe d’animation : Gina Thorstensen et Sarah Mazzetti aux décors, Brecht Evens au character design. De cette équipe cosmopolite naît un style multicolore, crayonné comme un dessin d’enfant, où chaque étape correspond à une variation dans les formes et les couleurs. La vie avec Manole l’acrobate, c’est le corps jaune sur fond de nuit dont les lignes rouges mouvantes marquent les contorsions. C’est la fluidité des déplacements dans le décor, où tout semble mobile. Avec Ishtvan, qui travaille sur les chantiers, le décor devient plutôt gris, les couleurs froides prennent leur place, et les formes deviennent plus géométriques, avec l’apparition d’angles droits. Et sa compagne et les amies de celle-ci sont d’un jaune différent de celui de Manole, un jaune un peu plus acide, contrasté de noir comme pour annoncer une part sombre pas si bien cachée. Chez Solange, le bleu clair des cheveux l’emporte sur tout le reste de la silhouette, cette masse lisse et douce dont rien de mauvais ne semble pouvoir sortir. Une masse qu’on retrouve orangée sur la tête de sa mère, alors que le grand-père hostile est tout gris et sombre. Et au milieu, Marona, toute de noir et de blanc, avec ses oreilles aux allures d’ailes d’oiseaux emplumées et sa queue en panache, charmant mélange de deux races que tout oppose (de là à y voir un plaidoyer antiraciste, il y a un pas qu’on franchira volontiers).

À travers ses péripéties, qui pourraient rappeler plusieurs films du genre comme L’Incroyable aventure de Bella, la petite chienne, rendue d’autant plus attachante par la voix Claire de Lizzie Brocheré, apprend sur l’humanité et la relation entre êtres vivants, mais aussi sur le rapport au temps qui passe, et au bonheur fugace. On n’aime pas tellement l’expression « leçon de vie », pourtant elle pourrait assez bien s’appliquer à cette histoire, celle d’un parcours en dents de scie dont la protagoniste choisit de toujours retenir le meilleur, de toujours considérer les acteurs/trices avec empathie, de ne jamais en vouloir à personne pour ses abandons successifs, toujours ouverte à de nouvelles étapes dans son périple, et toujours fidèle, en bon chien, à ceux et celles auxquel(le)s elle a donné son amour.

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