« Chère Léa », au café d’en bas

Après une nuit d’ivresse, Jonas décide sur un coup de tête de rendre visite à son ancienne maîtresse. Désormais séparé de sa femme, il aimerait reconquérir Léa, mais pour celle-ci c’est trop tard. Du café d’en face, Jonas entreprend de lui écrire une lettre…

Jérôme Bonnell a pris son temps pour revenir après À trois on y va, qu’on avait adoré en 2014 en dépit de ses menus défauts. Le cinéaste continue à tourner autour du genre de la comédie romantique, non pas cette fois en injectant la question du trouple et du polyamour mais en déplaçant le curseur après la relation sentimentale. De l’histoire entre Léa (Anaïs Demoustier), et Jonas (Grégory Montel), on ne verra rien, pas même un flashback, et on ne saura que très peu de choses par ce que les dialogues en disent. Comment et quand a eu lieu leur rencontre ? Combien de temps cette histoire a-t-elle duré ? Ce qui est sûr, c’est que la jeune femme s’est lassée de n’être pas la seule, et que la récente séparation de son amant d’avec son épouse (Léa Drucker) ne suffit pas à recoller les morceaux.

C’est pourtant bien l’ambition de Jonas lorsqu’il s’installe au café d’en face muni d’un stylo plume et d’une liasse de papier. Mais la question amoureuse se retrouve parasitée par la vie du petit bistrot, avec son patron, ses habitué(e)s loufoques, sans compter les coups de fil incessants qui dérangent Jonas dans son entreprise épistolaire. Le long-métrage mue vers la chronique de quartier, et s’allège par l’humour qui s’insinue dans les conversations entre le patron (Grégory Gadebois) et ses client(e)s. On se retrouve dans le principe de la « folle journée », à l’instar d’un Oh boy, où tout concourt à rendre chèvre le personnage masculin. Les vitres (du café, des fenêtres de chez Léa) deviennent un motif visuel central, avec de nombreux plans saisis à travers la devanture de l’établissement. On en arrive à un motif voyeuriste, mais sur un mode plus comique que chez Hitchcock ou De Palma. Lorsque Jonas s’infiltre dans l’appartement de son ex pour mieux entendre ce qui se trame avec l’homme qu’il interprète comme étant son rival (Pablo Pauly), on sent le goût du vaudeville du réalisateur revenir au grand galop, pour le meilleur. Les placements de caméras sont malins, l’usage des potentialités du logement bien trouvé : la réalisation jusqu’ici bien sage décolle un peu, et on ne boude pas notre plaisir.

On suit avec un certain divertissement les pérégrinations des personnages, attachants quand bien même on ne saurait pas grand chose d’eux, même si parfois à force d’allers-retours on ne sait plus trop ou donner de la tête. Quelques révélations bien placées nous guident vers le pressentiment d’une chute qui n’apparaîtra pas explicitement, et c’est tant mieux. Bonnell tient sa ligne, le plus intense est ce qui ne se voit pas à l’écran, ce qui se trame hors-champ. L’idée est séduisante, quitte à ce que le résultat manque un peu d’émotions fortes.

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