Festival du Film Francophone d’Angoulême – Eiffel

Alors qu’il souhaite se lancer dans un projet lié au métro, Gustave Eiffel recroise une ancienne amante qui lui suggère de répondre au concours de l’exposition universelle. Il propose une tour métallique de 300 mètres de haut…

Ce n’est pas qu’on n’ait pas passé un bon moment avec la pétulante comédie Papa ou maman, mais on ne s’attendait pas forcément pour autant à retrouver Martin Bourboulon aux commandes d’une grosse production, présentée en ouverture du FFA 2021. Et pourtant, c’est lui qui hérite du biopic de Gustave Eiffel, un film en costume avec une ambition certaine, puisque parmi les modèles cités par le réalisateur et son directeur de la photo Matias Boucard on trouve rien de moins que Titanic ou La porte du paradis

L’histoire de la conception scénaristique a pas mal circulé, on sait que l’idée originale de Caroline Bongrand est passée de mains en mains durant des années avant de réussir à trouver le financement nécessaire à la réalisation. Jusqu’au montage, l’équipe a bataillé avec les deux arcs narratifs de l’intrigue : bien entendu la conception et la construction de la tour Eiffel, mais aussi la romance entre Gustave et Adrienne. Clairement, à l’écran, les hésitations se ressentent, et on a l’impression que le parti-pris est peut-être celui qui attirera du monde en salles, mais pas celui qui aurait pu donner une grande œuvre. Extrêmement symptomatique, les passages où l’on aperçoit Gustave dessiner la structure de la tour, relégués au statut de vulgaires intermèdes voire simples plans de coupes pendant de longues scènes racontant par le menu la rencontre entre le jeune ingénieur et la jolie bordelaise. Du cadrage, qui abuse des gros plans sur les visages, en particulier lorsque les larmes montent aux yeux d’Emma Mackey ou lorsque Romain Duris arbore un demi-sourire amer, à la musique d’Alexandre Desplat, en passant par la lumière couleur champagne, l’ensemble a tendance à verser dans le sirupeux à force de vouloir toucher avec la part « intime ». Un déséquilibre d’autant plus problématique que l’on ne sait pas grand chose de la vie privée d’Eiffel, et que la romance avec Adrienne est très largement inventée. 

Et pourtant, il y avait des tas de choses passionnantes à raconter sur la construction de la Dame de Fer, au lieu d’insister lourdement sur sa silhouette de A majuscule. Des problèmes de financement en passant par le retournement de l’opinion publique, tous les éléments qui ont pu torturer Eiffel, non pas en tant qu’amoureux transi mais qu’homme passionné par son projet (la seule chose vraiment certaine à son sujet), sont survolés sans être approfondis. La scène la plus intéressante sur le fond est la présentation du projet au comité chargé d’évaluer les propositions, à renfort de schémas et de maquettes. Mais même alors qu’on apprend des choses sur les caissons à vérins hydrauliques, une innovation majeure dans la construction de l’époque, les schémas sont à peine visibles à l’écran, les maquettes pas cadrées de près. Tout comme lorsque le processus de raccordement du premier étage est mis en place grandeur nature, les mouvements de caméra foutraques et tournicotants manquent de précision pour révéler la minutie du travail et les risques encourus par les ouvriers. 

L’ensemble reste largement frustrant, le sujet principal semblant quasiment relégué au second plan, jusque dans l’image qui met du flou partout sauf sur les personnages, gâchant la possibilité de beaux plans du Paris de l’époque. Les intérieurs sont plus réussis, avec un travail de reconstitution de mobilier. Côté casting, sans avoir de reproche majeur à faire au trio principal, on peut regretter qu’il n’y ait pas plus à jouer pour Pierre Deladonchamps. Quant au couple Duris-Mackey, sa différence d’âge (pas justifiée par la réelle vie sentimentale d’Eiffel), choque lorsqu’on perçoit que l’actrice franco-britannique a quasiment le même âge qu’Armande Boulanger, qui interprète la fille d’Eiffel. N’y aurait-il pas eu une actrice entre 35 et 40 ans pour jouer l’intérêt amoureux de l’acteur de 47 ans ? Un problème récurrent mais qui s’ajoute aux autres défauts du film. Cependant, avec son accent mis sur la romance et les grands sentiments contrariés, nul doute que le film de Martin Bourboulon trouvera matière à séduire un large public. 

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