« Milla », la jeune fille et l’amour

Atteinte d’un cancer, Milla vit son adolescence comme elle peut entre un père psy et une mère bourrée de cachets. Quand elle rencontre Moses, un junkie un peu plus âgé, elle s’entiche de ce garçon qui n’a peur de rien…

Movie Challenge 2021 : un film avec un prénom dans le titre

La réalisatrice australienne Shannon Murphy a lu de nombreux scénarii qui auraient pu donner lieu à son premier long-métrage, avant de tomber sur LA pépite : l’adaptation de la pièce de la dramaturge Rita Kalnejais, dans lequel elle retrouve son humour en dépit du sujet tragique de l’intrigue.

C’est effectivement tout l’équilibre instable avec lequel tangue le film : retranscrire la vie d’une famille totalement barrée et dysfonctionnelle rongée par la maladie de la fille unique adolescente avec des moments de légèreté, de cynisme, de poésie, tout en ne cachant pas la réalité sordide du cancer et de ses répercussions au quotidien. Ponctué de didascalies en capitales aux couleurs pop implantées dans le décor, ce portrait doux-amer doit énormément à son esthétique. On peut saluer Andrew Commis à la photo mais aussi Amelia Gebler et Angela Conte aux costumes et à la coiffure, qui composent un univers identifiable et élégant, dans lequel l’évolution du look de Milla coïncide avec sa mutation intérieure. D’abord adolescente sage avec sa longue queue de cheval et son uniforme d’écolière, elle apparaît avec plusieurs perruques au fil de sa maladie, d’un blond assez sage à un chignon platine ébouriffé pour terminer par un carré turquoise assorti à sa robe du bal de promo.

L’aspect classique du coming of age, avec les confrontations aux parents, les fêtes, l’alcool, les premiers émois amoureux, le fait de sécher les cours, est contrebalancé par la situation particulière de la jeune fille, atteinte d’une récidive de cancer. Dans ce rôle délicat, Eliza Scanlen démontre une fois encore sa délicatesse, dans une déclinaison de l’adolescente rêveuse et sage qu’elle incarnait dans Little Women. Bien qu’aussi souffrante que Beth, Milla lui offre tout de même l’opportunité de dévoiler plus de facettes, un visage mobile révélant des émotions changeantes comme un temps de bord de mer, saisi en gros plan par la réalisatrice avec des éclairages sensibles, une élégance au violon alors qu’elle n’a eu que deux semaines pour apprivoiser l’instrument, un subtil mélange d’enfance et de féminité, qui s’exprime particulièrement dans les scènes musicales et dansées, de loin les plus réussies du film.

Face à elle, Toby Wallace ne démérite pas en junkie sincère mais empêtré dans ses problèmes et ses manières directes, inadapté à la vie familiale que Milla tente de lui faire découvrir en l’imposant à ses parents démunis. Le jeune homme dégage une vibe proche de Frank Dillane dans Fear the Walking dead, avec un côté téméraire mais sensible qui se marie bien avec l’univers ambivalent du métrage.

Le couple totalement paumé des parents est moins réussi, tombant totalement dans l’excès à la fois de mutisme et d’inaction pour le père et d’hystérie maladive pour la mère. Leurs dialogues consistant à se flageller en permanence alors que leurs décisions ont pour unique visée d’essayer d’adoucir la vie de leur enfant malade sont copieusement agaçants sur la durée. C’est le problème du métrage : alors qu’au début il part sur plein de pistes, nous laissant perdus, il a petit à petit tendance à tout condenser et réduire à l’idée de l’agonie de Milla, nous imposant une scène atroce de tentative d’euthanasie et un dernier segment sciemment tire-larmes, comme pour forcer l’émotion au cas où on ne l’aurait pas ressentie auparavant. L’ensemble rappelle très fortement Alabama Monroe dans le côté alambiqué de son montage et son insistance sur la tragédie. Dommage, car la légèreté qu’il réussit à trouver dans de nombreuses scènes lui allait bien.

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5 commentaires sur “« Milla », la jeune fille et l’amour

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  1. Merci pour ton retour ! J’ai vu la bande-annonce l’autre jour et je n’avais pas compris que la dénommée Milla est malade – j’ai dû avoir un moment d’inattention. Du coup, ça et ton retour, je ne pense pas le voir (en tout cas, pas tout de suite).

    1. Je crois que ça ne se voit pas trop dans la bande-annonce en effet. En fait c’est vraiment une question de sensibilité, pour ça que je cite Alabama Monroe qui est très apprécié de beaucoup de monde (d’ailleurs j’ai lu des retours dithyrambiques sur Milla aussi).

      1. Je n’ai pas vu « Alabama Monroe » donc ça ne me parle pas – je me souviens qu’il avait eu de bons retours et qu’on me l’avait très fortement conseillé. Pareil, il faudra que je me fasse mon idée un de ces jours.

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