Festival Chéries-Chéris 2021 – sélection de courts-métrages

Jo

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On suit Jo, qui se filme avec sa GoPro, dans le quotidien de sa transition puis de sa tentative de sevrage de la cocaïne…

Ann Sophie Wieder rencontre Jo. Une vraie rencontre, qui transparaît à l’écran. Car ce que Jo transmet à la réalisatrice, c’est un matériau ô combien intime. Car c’était d’abord seul et pour lui-même que Jo avait commencé à se filmer, documentant pas à pas d’abord sa transition, mais aussi sa tentative de désintoxication de la drogue. Ce qui bouleverse, c’est la solitude qu’on perçoit chez cet homme, qui semble n’avoir personne à qui se confier si ce n’est la caméra comme un miroir, et à travers ce miroir, Ann Sophie, dépositaire de ce journal intime par l’image. Il y a des hauts, des bas, des moments de joie où l’on danse dans un couloir, des moments de déprime où l’on étouffe dans le studio encombré. La relation de l’homme à son chat bouleverse, unique présence vivante qui tient compagnie, rassure et apaise. La sensibilité de Jo traverse l’écran jusqu’au cœur.

Letter to my mother

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Enfant, Amin a joué dans un film de Kiarostami avec sa mère. Des années plus tard, il est temps de révéler ce qui se cachait derrière le conflit présent à l’écran.

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Le principe du film rappelle fortement Le tampon, un court qu’on avait pu découvrir lors de l’édition 2021 du Festival Premiers Plans. Le cinéma devient le moyen d’exprimer l’indicible, ce qui a toujours été tu par la jeune victime. Ici, c’est Amina Maher qui décide de parler à cœur ouvert à sa mère, en alternant les images du présent et celle de son enfance, quand le duo apparaissait dans le film de Kiarostami, de façon concomitante aux faits relatés. Ayant subi le viol par un adulte de l’entourage familial, Amina a grandi avec ses blessures transformées en une rage contre le monde, y compris sa mère n’ayant pas su voir ce qui se tramait sous son toit. Aujourd’hui, Amina converse en visio avec un psy qui lui explique le cercle vicieux à déconstruire et l’importance d’extérioriser sa souffrance par l’art. Ce film fait partie de la transformation d’Amina, qui avec ses poils semble laisser derrière le traumatisme subi.

 

Beauty Boys

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Léo se prépare pour sa prestation sur la scène ouverte de son village des Vosges, qui doit s’accompagner de l’apparition surprise de son cousin, la drag queen Cookie. Mais ce n’est pas du goût de son grand frère…

On retrouve une ambiance de fête au village qui n’est pas sans rappeler Miss Chazelles dans ce court signé Florent Gouëlou. Une scène ouverte, c’est l’occasion pour chaque jeune d’affirmer son talent et son identité. Pour Jules, c’est un morceau de rap qu’il a écrit. Pour son frère Léo, c’est une chorégraphie en talons hauts, qui sous la pression se transforme en show en drag queen, histoire de réaffirmer sa liberté d’expression. Le choc des cultures est assez classique mais la mise en scène est soignée et le casting très convaincant. Une façon d’aborder simplement et efficacement le transformisme, comme une passion artistique qui mérite autant de visibilité qu’une autre. On salue le travail de costumes et de maquillage pour rendre le tout à la fois réussi et crédible pour une première fois d’amateurs.

De temps en temps je brûle

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Louise est photographe, elle travaille en studio sur un projet de pose nue avec exposition longue, d’après une technique très ancienne de travail sur la lumière…

Encore une incursion dans le cinéma brésilien avec ce court de Carlos Segundo, qui propose une approche quasi-documentaire avec un très joli travail de mise en lumière, créant un clair-obscur feutré dans l’atelier de Louise. En quelques plans, on comprend le quotidien de la photographe et l’essence de son projet, autour de la fusion des corps. La rencontre avec la jeune Paula est l’occasion d’un bouleversement pour les deux femmes, qui semble tant spirituel que physique. Est-ce donc ce qu’on appelle une rencontre ? La scène de pose, qui présente le travail de Louise avec cette technique si particulière qui imprime les corps dans un noir et blanc diaphane sur la pellicule, est absolument magnifique.

Mat et les gravitantes

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Dans un squat à Nantes, Mat et ses copines organisent un atelier d’auto-examen gynécologique. L’occasion de découvrir leurs corps de l’intérieur…

Dans ce court documentaire, Pauline Pénichout nous présente le portrait d’une jeune femme au sein d’un groupe entièrement féminin. D’abord, Mat est vue toujours avec d’autres, dans un parcours de sororité : la scène d’introduction la montre prenant son bain avec sa sœur, évoquant leurs ressemblances physiques avec leurs parents. Une façon maline de poser les deux enjeux majeurs du métrage : le corps, et le rapport aux autres, en particulier aux sœurs au sens large. Car dans le squat, de nombreuses filles sont présentes pour organiser et vivre cette expérience particulière : s’auto-examiner, en groupe, non pas d’un point de vue médical, celui de pathologies éventuelles, mais simplement afin de mieux connaître leur corps, et en quelque sorte de reprendre la main sur un examen généralement pratiqué par des professionnel(le)s dans un cadre subi. Les conversations autour de l’acte sont passionnantes car elles mettent en lumière les attentes d’une jeunesse féminine d’aujourd’hui : se réapproprier son corps et ses sensations, faisant fi des discours surplombants, et tenter de créer des liens pour être à l’aise avec son corps devant d’autres. La communication est le nerf de la guerre, et lorsque Mat évoque face caméra son rapport à la sexualité, c’est pour le rappeler d’une façon très juste qui parlera à beaucoup d’entre nous.

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