« My Zoé », aimer jusqu’à l’impossible

Isabelle et James, fraîchement séparés, se disputent autour de la garde de leur fille unique Zoé, que chacun(e) aurait voulu exclusive. James reproche à son ex d’avoir rencontré quelqu’un et de trop travailler dans son labo de génétique, confiant Zoé à la baby-sitter…

Lire les déclarations d’intention de Julie Delpy quant à ce projet a de quoi rendre curieux/se, et même oublier l’expérience désagréable qu’a constitué le visionnage de ses films précédents autour de la famille (Two Days in Paris, Two Days in New-York, Lolo). Il est question de réflexion philosophique dès l’enfance, de part de l’inné et de l’acquis en chacun(e) de nous à mesure que nous grandissons, de force de la vie qui se renouvelle et de posture féministe. Un programme extrêmement alléchant.

Et clairement l’idée du film est intéressante, dans son côté jusqu’au-boutiste de la mère prête à tout pour son enfant, mâtinée d’une dose de très légère anticipation, qui rend possible des perspectives actuelles irréalistes et se matérialise par quelques innovations technologiques discrètes mais assez réussies comme le téléphone-bracelet qui s’enroule au poignet ou l’ordinateur plastique qui reprend toujours sa forme initiale. On peut regretter que cet aspect légèrement futuriste ne soit pas plus développé, car à ce stade on se contente de quelques touches dans un monde bien similaire au nôtre.

Il faut dire que le film se compose d’une très longue exposition, qui donne l’impression de n’entrer dans le vif du sujet qu’aux deux-tiers de sa durée. Tout ce qui aurait pu constituer un intérêt plus scientifique et technique est relégué à un traitement ultra-rapide et survolé, qui s’épargne toutes les questions concrètes.

Car en dépit de l’excellent choix de la jeune Sophia Ally dans le rôle de Zoé, qui apporte un mélange de fraîcheur et de profondeur aux scènes de vie familiale quotidiennes, tout le début paraît bien trop long. Le côté binaire d’une vie entre des parents séparés a déjà été traité maintes fois au cinéma et l’écriture de My Zoé n’ajoute rien à ce sujet. On sent que quelque chose va se produire, mais à force d’attendre, l’événement perd de sa force émotionnelle tant on l’a vu venir, et tant on avait hâte que quelque chose advienne. Sans doute l’aspect caricatural des personnages adultes n’est-il pas étranger à cette lassitude. Comme dans ses films précédents, la réalisatrice semble s’appliquer à rendre chacun(e) parfaitement insupportable, de sorte que les conflits familiaux soient inévitables. La palme revient à Richard Armitage en père glacial, ex-mari jaloux, possessif, accusateur, dont on sous-entend même la violence. Les disputes de l’ancien couple sont si chargées en reproches stéréotypés et sans nuances des deux côtés qu’on finit par s’en amuser et compter les points, oubliant ce qui est en jeu pendant ce temps dans un couloir voisin de la pièce vitrée qui permet de les observer sous toutes les coutures s’en mettre plein la tête.

Quant à l’aspect féministe, vu les conséquences terribles des choix de vie – au demeurant tout à fait normaux jusque-là – d’Isabelle, on ne peut pas vraiment dire que le scénario valide la possibilité d’être à la fois une bonne mère et une grande spécialiste professionnelle. Au contraire, en zappant totalement la carrière d’Isabelle pour se concentrer sur son combat de mère (alors qu’on voit encore James répondre à des sollicitations de son cabinet d’architecte), l’intrigue la renvoie à cet unique statut matriciel.

On se demande un peu pourquoi Daniel Brühl a tenu à financer ce projet, qui lui colle un rôle sans cohérence psychologique de scientifique hors des cadres, et on regrette de n’apercevoir Gemma Arterton quasiment que dans deux-trois jolis gros plans de son profil. Bref, une bonne idée à l’exécution chaotique, manquant de recul et de précision sur l’aspect scientifique de son sujet, et tombant dans des écueils déjà connus.

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