Des enfants qui jouent à la balle et soudain, l’un d’eux qui apostrophe une fillette « Negra ! » pour qu’elle lui renvoie son ballon. À partir de ce jour, Medhin Tewolde Serrano s’interroge sur son identité…
La réalisatrice Medhin Tewolde Serrano s’est formée au documentaire pour interroger dans ce film sa propre identité, mais elle découvre en devenant adulte et en posant des questions à d’autres femmes mexicaines qu’elle est loin d’être la seule avec ses questionnements. Avec Negra, elle s’exprime et donne la parole à quatre autres femmes mexicaines afrodescendantes afin d’élaborer une cartographie de la situation de ces personnes au Mexique. Comment parler de racisme quand la plupart des habitant(e)s refusent même de considérer qu’il existe des personnes noires dans leur pays ? C’est une séquence marquante, sur un marché, où un habitué évoque les personnes noires comme étant forcément des afro-américain(e)s, mais pas ici, non, pas au Mexique. Pourtant, l’esclavage n’a pas épargné le pays, et les descendant(e)s des populations déplacées de force depuis l’Afrique sont bien présent(e)s, très souvent métissées avec les populations dites indigènes.
Pour les femmes concernées, la construction de l’identité s’effectue avec difficulté, dans la douleur, comme elles le racontent face à la caméra de la réalisatrice, qui les interviewe tranquillement assises ou les suit dans un contexte de leur vie quotidienne. La réalisation et le montage sont d’une grande simplicité, aucun artifice ne vient alourdir le propos ou parasiter le message. Ce qui compte, c’est la parole de ces femmes, à qui enfin quelqu’un offre la possibilité de s’exprimer. Moqueries et mise à l’écart dans l’enfance, tabous dans la famille, difficulté à trouver sa place et à se construire, chacune semble avoir vécu plus ou moins les mêmes étapes. Mais toutes n’ont pas eu les mêmes réflexes pour vivre avec cette identité : éloignement des personnes qui les jugent, expression par l’art, création d’un alter ego de fiction…
Juste, fort et touchant, ce documentaire met en lumière une parole trop peu entendue, en espérant que cela puisse faire bouger les lignes pour les personnes interrogées et toute la population mexicaine.
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