Les Wheeler incarnent pour leur entourage un couple de rêve. Ils ont deux enfants et habitent un pavillon de banlieue pimpant, mais Frank déteste son travail alimentaire et April rêve de partir vivre à Paris…
Le Britannique Sam Mendes s’attaque à l’adaptation d’un roman-phare de la littérature américaine contemporaine, Revolutionary Road de Richard Yates, multi-récompensé mais qui a fait couler beaucoup d’encre. Et pour cause, l’intrigue a de quoi écorner l’image des banlieues parfaites et des couples qui les occupent, bien des années avant The ‘Burbs ou Desperate Housewives. Dans les années 60, le mariage est une institution à laquelle il est mal vu de renoncer, et le conformisme se répand comme une épidémie.
Forcément, ce n’est pas avec le même regard que l’on peut saisir l’histoire des Wheeler aujourd’hui. Maintes fois au cours du visionnage, on aurait envie de prodiguer des conseils aux personnages, mais il faut se remémorer le contexte. Ce que le film ne manque pas de faire grâce à sa reconstitution soignée des années 50. L’équipe de Kristi Zea a mis le paquet pour que la maison des Wheeler soit réaliste et incarne parfaitement la vie en banlieue : jardin où les enfants peuvent s’amuser, mais sur lequel tout le voisinage a une vue, pièces relativement spacieuses mais qui semblent rapidement encombrées par le mobilier, décoration sans trace de luxe mais qui peut suffire à faire paraître l’ensemble confortable sous la jolie lumière dorée du soir, lorsque Frank rentre de sa journée de travail. Les tableaux de Hopper ont inspiré cette ambiance et ces éclairages propices à l’intimité. Mais ici, par « intime » il faut moins entendre sensuel que « tout ce qui se dit entre deux époux et que personne ne doit savoir sous peine de ternir leur image ».
On a dit de Marriage Story que le film exprimait à merveille l’usure, la déception que deux personnes peuvent ressentir au cours de leur union, les disputes et le désamour, mais tout cela était déjà largement et finement exploré dans Les noces rebelles. Le titre français est d’ailleurs assez absurde alors que Revolutionary road est d’une ironie magnifique : le couple habite « route de la révolution » mais cette maison représente pour eux une impasse dans laquelle ils s’engluent au fil du temps. Lors de leur rencontre, April rêve d’une carrière d’actrice et Frank passe d’un boulot à l’autre le temps de trouver sa voie, sachant juste qu’il ne veut pas finir comme son père. Mais une dizaine d’années plus tard, les pièces dans lesquelles April a joué n’ont pas rencontré le succès et elle subit une vie au foyer à effectuer toutes les tâches ménagères pendant que son mari trompe son ennui au bureau en draguant les jeunes recrues. Le couple est tombé dans le cliché absolu de ce qu’il refusait d’être. Et les enfants ? Très peu présents à l’écran, ils sont purement et simplement les enjeux d’un calcul pour leurs parents, et de disputes à leur sujet, sans jamais apparaître comme des personnes à part entière avec lesquelles se tisseraient des liens. Tout est focalisé sur le couple, au point que la mise en scène fasse par moments penser à l’adaptation d’une pièce de théâtre avec un nombre de lieux et de comédien(ne)s limité. Mais quel(le)s comédien(ne)s ! Sam Mendes s’offre le couple de Titanic pour incarner la descente aux enfers de jeunes amoureux dont les sentiments se changent en haine à mesure que le quotidien les déçoit. Kate Winslet surtout impressionne par la vitalité, la lucidité et l’ambition de son personnage, qui tente envers et contre tout – et surtout contre son mari – de les extirper de la routine dans laquelle ils sont tombés. Mais le conformisme et le confort matériel sont des aimants puissants pour le faible Frank. On note aussi la prestation géniale de Michael Shannon, le « fou sorti de l’asile » comme son personnage se définit, qui n’est rien d’autre que la voix de la vérité que tous/tes refusent d’entendre car il n’y a qu’elle qui blesse.
Tragique, l’histoire des Wheeler est derrière la trajectoire intime un pamphlet contre l’immobilisme et le mode de vie standardisé qui éteint les rêves et les tentatives d’accomplissement personnel.
Je me souviens avoir vu ce film au cinéma et en être ressorti bien bousculé ! Un film que je devrais revoir avec dix ans de plus et un petit peu plus d’expérience…
Il passe ce soir sur Chéries25 😉
A tiens pourquoi pas, dilemme il y a la fin de HPI aussi… j’aime beaucoup le personnage jouée par Audrey Fleurot c’est loufoque mais super intéressant !
Ma maman regarde HPI mais j’arrive pas à trouver le temps pour les séries ! J’ai réussi à me caser la s2 d’Hippocrate parce que vraiment j’aime infiniment le travail de Thomas Lilti mais déjà 8 épisodes c’était pas simple dans mon emploi du temps.
Je comprend tout à fait j’ai été dans une même période il y a quelques années et depuis peu je ne trouve plus de temps pour les films. Ah c’est tout un art de planifier ! Hippocrate me fait très envie !
Oh oui Hippocrate je recommande très vivement, mais il ne faut pas être trop sensible à la vue du sang, des opérations etc.
Ah ça c’est mon point faible dans les séries médicales comme Doc ou Thd resident j’écoute les scènes d’opérations plus que je ne les voient. Mais je vais quand même tenter !
Moi je me cache les yeux ha ha
Un film que j’avais beaucoup aimé et qui se servait très habilement du fait que quasiment tous les spectateurs se souvenaient de Titanic : pas besoin d’en faire des tonnes sur le début de leur histoire (Rose et Jack, quelle force d’évocation) car le public leur attribuerait tout de suite le statut d’amants légendaires… pour mieux les voir se déchirer…
Ah là c’est sûr qu’ils cassent l’image romantique !