Manuel, étudiant en architecture à Buenos Aires, rentre dans sa ville natale pour célébrer les 25 ans de mariage de ses parents. Il y retrouve toute sa famille pour la première fois depuis son coming out…
Le quatrième long-métrage de l’Argentin Nicolás Teté faisait déjà partie de la sélection du festival Chéries-Chéris en 2020, qui n’a malheureusement pas pu avoir lieu en raison de la crise sanitaire. Mais le film arrive finalement jusqu’à nous grâce au tout nouveau festival en ligne de la plateforme QueerScreen en association avec Jock.
En espagnol, sa langue originale, le film s’intitule Todos tenemos un muerto en el placard o un hijo en el closet, un titre qui en dit déjà long sur le contenu : en effet, la mention du placard renvoie évidemment à l’expression « sortir du placard » (to come out) mais la seconde partie du titre serait plus proche de l’idée « faire un enfant dans le dos » ou de l’expression « avoir un polichinelle dans le tiroir ». Autant d’éléments que l’on retrouve dans l’histoire de Manuel et de sa famille.
Si le tout début du long-métrage nous présente le protagoniste dans son appartement de Buenos Aires avec son compagnon, qui doit partir à l’étranger pour travailler, rapidement l’intrigue se concentre autour des relations familiales. Manuel retourne là où il a grandi, et est chaleureusement accueilli par sa mère, en dépit de la surprise de son arrivée, signalée par l’alarme de la maison. Ce bruit strident contraste avec la douceur de la bande-originale, qui use de tintinnabulements délicats, comme si la confrontation avec la famille mettait tout le monde en alerte, ce qu’on comprend d’autant mieux lorsqu’on apprend que lors de la dernière réunion familiale, Manuel a fait son coming out. Facundo Gambandé, jusqu’ici surtout connu des enfants pour son rôle dans la série Disney Violetta, trouve ici l’occasion d’incarner un jeune homme extrêmement attachant, qui s’illumine dès qu’il cuisine pour ses proches, se soucie de son entourage, fait preuve de sensibilité et de romantisme. Le scénario lui offre l’occasion de scènes très contrastées, de la joie solitaire de danser sur une chanson qu’il aimait ado au chagrin qu’il ne peut laisser échapper que seul sous la douche. Sa mère (Maria Fernanda Callejón) et sa sœur (Antonella Ferrari) constituent des ancrages, avec lesquelles le jeune homme partage des moments de complicité, mais toutes les relations interpersonnelles de la famille sont fragilisées par les stéréotypes et préjugés qui les gangrènent. La scène du repas avec les grands-parents est particulièrement gênante et montre bien la difficulté de s’épanouir lorsque l’opinion commune est un rejet de sa personne, en l’occurrence de son orientation sexuelle.
Mais au-delà de la question de l’acceptation de l’homosexualité de Manuel par ses proches, il est aussi question des différences que les parents font entre leurs enfants, mettant sans cesse en avant leur deuxième fils, Luisito, champion de tennis, ainsi que des choix qu’ils font pour ce qu’ils pensent être le bien de leur progéniture. Peu à peu, plusieurs secrets se dévoilent et l’on se rend compte que chacun(e) des enfants pourrait faire des reproches à ses parents sur la façon dont ceux-ci le/la traite. Ce rassemblement est donc l’opportunité, en quelques jours, pour le doux Manuel et son entourage, d’essayer de s’ouvrir et mieux communiquer afin d’éviter la rupture annoncée. Nicolás Teté filme cette histoire du quotidien avec beaucoup de délicatesse, une photo délicate qui atténue les contrastes et mise sur des lumières claires et enveloppantes, prenant le parti de nuancer la violence psychologique de certaines situations, et on lui en sait gré.
Projection en ligne dimanche 14 mars 2021 à 18h sur QueerScreen.
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