Une entreprise de jouets met sur le marché une nouveauté, dont le fils d’un commerçant réussit à obtenir quelques exemplaires avant la mise en vente. Problème : deux groupes de figurines sont prêts à une lutte à mort…
Movie Challenge 2021 : un film avec une course-poursuite
Après les deux Gremlins, aux multiples messages, The ‘burbs qui se moquait des banlieues, et Panic sur Florida Beach en hommage au cinéma, Joe Dante revient en 1998 avec Small Soldiers, un film qui poursuit plus clairement la satire anti-capitaliste du cinéaste. Le scénario écrit à plusieurs mains (Gavin Scott, Adam Rifkin, Ted Elliott, Terry Rossio) est acheté par Spielberg en 1992 et confié une fois encore à Joe Dante. Mais entre le projet et sa réalisation, il a fallu attendre les progrès des effets spéciaux afin de rendre concrète cette idée folle.
Comme dans Toy Story ou L’indien du placard, il s’agit de jouets qui s’animent. Mais cette fois, leur aspect vivant est explicité de façon technologique : un ingénieur peu scrupuleux, désireux de plaire au nouveau PDG ambitieux du groupe qui l’emploie, commande des micro-processeurs haut de gamme prévus pour l’armée, et en fait l’atout de ses jouets révolutionnaires. À l’écran, il faut donc rendre les figurines capables de se mouvoir avec un certain naturel, d’interagir, entre elles et avec les humain(e)s, de parler, mais aussi d’apprendre et d’évoluer. Le rendu visuel est splendide et a très bien vieilli, et c’est d’abord ce qui éblouit dans ce film, a fortiori lorsqu’on sait que le tournage a été particulièrement compliqué, avec des modifications en cours de route. À l’écran, pourtant, tout est fluide, et les jouets sont magnifiques. C’est d’autant plus frappant si on les compare aux figurines qui ont accompagné la promo du film dans les menus Burger King. Esthétiquement, le film est de plus en plus fascinant, à mesure que les jouets apprennent à fabriquer des outils, armes et véhicules à partir des objets qu’ils dénichent chez les humain(e)s. Le résultat a de quoi séduire les grands enfants.
On a beaucoup reproché au film, à sa sortie, un écart entre un positionnement envers un public jeune (la thématique des jouets, le tandem Gregory Smith-Kirsten Dunst, alors âgé de 15 ans environ, la campagne marketing avec Coca-Cola et Burger King, les produits dérivés…), et un contenu très sombre et violent, où les jouets s’attaquent non seulement les uns aux autres mais aussi aux humain(e)s. Pourtant, c’est ce qui fait tout le sel de cette œuvre, qui pour faire parler d’elle emploie les ressorts qu’elle dénonce. Est-il acceptable de destiner une œuvre violente à un public familial, afin de viser une cible large et pouvoir cumuler plus d’entrées ? De même : est-il admissible d’utiliser du matériel de guerre pour des jouets pour enfants largement markettés, dont personne n’a vraiment mesuré le potentiel ?
Extrêmement malin en intra et extra-diégétique, le film est à la fois captivant, avec une action sans temps morts, très drôle, notamment grâce à ses multiples références et détournements (citons en pagaille les poupées type Barbie, les Spice Girl, des films de guerre, Gremlins et Titanic), cruel dans sa satire. Il joue perpétuellement sur les deux tableaux, l’aventure vécue par son héros au physique enfantin, mais aussi l’atrocité qui est dévoilée, d’une entreprise sans scrupules, pour laquelle la mort, de jouets intelligents ou d’humain(e)s, constitue un détail si elle n’entache pas le succès commercial. Injustement décriée, c’est peut-être l’œuvre la plus synthétique de son cinéaste, qui fourmille d’idées sans s’éparpiller en termes de sens, et sans nul doute la plus époustouflante visuellement.
Comme je te le disais, je ne connaissais pas du tout ce film et l’affiche ne m’aurait pas donnée envie, mais tu y parviens et j’espère avoir un jour l’occasion de le voir. Ta chronique est très convaincante sans trop en dévoiler, c’est parfait !
Merci ! Oui l’affiche est moche, heureusement je ne l’avais pas vue avant le film !