Taisto quitte sa Laponie, où il était mineur, avec une voiture décapotable dont il a hérité. En route pour Helsinki, il est détroussé par des bandits et arrive donc en ville avec sa voiture pour seul bien…
Movie Challenge 2021 : un film faisant partie d’une trilogie
En 1988, lorsque sort Ariel, le film est une sorte de dernière chance pour redresser la société de production d’Aki Kaurismäki, à la fois scénariste, réalisateur et producteur de ses œuvres. Mais c’est aussi le deuxième volet d’une trilogie dite « du prolétariat » débutée deux ans plus tôt avec Ombres au paradis et qui sera conclue en 1990 avec La fille aux allumettes, une réécriture libre du conte d’Andersen.
Ariel va rencontrer le succès, obtenir des récompenses, s’exporter, et sauver de la faillite le réalisateur, lui permettant de continuer à tourner des films (jusqu’à L’autre côté de l’espoir après lequel il annonce sa retraite). Qu’est-ce qui a tant plu dans ce long-métrage ? Probablement une forme de simplicité. Il y a une forme d’économie dans tous les aspects du film, qui en font une œuvre resserrée, sans rien de superflu (le film ne dure que 68 minutes). L’écriture se concentre sur le parcours d’un personnage central, Taisto (Turo Pajala), et un petit nombre de personnages secondaires importants : le bandit qui lui vole son argent, la jeune femme qu’il séduit et l’enfant de celle-ci, son co-détenu en prison. Au montage, des ellipses viennent alléger l’intrigue des éléments non-essentiels, ne laissant que des scènes-clés qui font réellement avancer l’histoire. Pas d’arcs narratifs secondaires, pas de digression, rien qui serve à « meubler ». Chaque plan a son utilité, et on pourrait presque dire que chaque objet qui apparaît dans le cadre a son sens. Même les tempéraments des personnages sont simples : très peu d’atermoiements, de dialogues qui ne soient pas purement pragmatiques. C’est assez marquant dans le cadre de la relation qui se noue entre Taisto et Irmeli (Susanna Haavisto) : très rapidement, le couple naît, sans qu’il soit besoin de grandes interrogations sur les sentiments qui les unissent. La jeune femme demande à l’homme lors de leur première nuit ensemble s’il compte s’en aller au matin, ce à quoi il répond « non, nous resterons toujours ensemble », et voilà.
Pas de fioritures non plus dans la façon de filmer, assez dynamique, qui nous plonge d’une atmosphère de film social au départ dans un film de gangsters. Pour avoir voulu se venger de son voleur, Taisto se retrouve en prison, mais ne compte pas y rester bien longtemps (forcément, puisqu’on est dans la sélection évasion). Il peut compter sur le soutien de son co-détenu (Matti Pellonpää) ainsi que d’Irmeli, décidée à l’épouser. Comme toutes les autres, la scène du mariage est d’une extrême sobriété, les deux époux n’ayant même pas songé à amener un deuxième témoin.
À travers le parcours de cet homme qui souhaite mener une vie calme en famille mais se trouve confronté à la violence du monde, au point de devoir en adopter les codes, le cinéaste retrace la difficulté à s’en sortir et à faire sa place à la capitale pour un homme venu de la Laponie profonde, où le travail se raréfie. Si la Finlande ne peut offrir à ceux qui la désirent une vie paisible, si seul le banditisme est une option pour obtenir un minimum d’argent quand on part de rien, alors l’espoir est à aller chercher ailleurs.
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