« Poissonsexe » : « mon cœur bancal dans ton bocal »

poissonsexeDaniel a deux obsessions dans la vie : sauver les poissons dans un monde où toute vie marine a presque disparu et exaucer son rêve de paternité. Après un rendez-vous manqué, il découvre un poisson à pattes sur la plage…

 Quand j’ai découvert l’existence d’un film nommé « Poissonsexe », j’avoue que j’ai d’abord plongé dans des abîmes de perplexité. Qu’est-ce que c’est que ce titre ? Plutôt une bonne idée, visiblement, parce qu’il a suffi à titiller ma légendaire curiosité cinématographique.

En fait, assez simplement, le titre fusionne les deux grandes thématiques du film. D’une part, les poissons, qui constituent l’objet de travail mais aussi de passion de Daniel, le personnage principal, lunaire et touchant Gustave Kervern (que je découvrais vraiment ici, n’ayant jamais été très attirée par ses films avec Benoît Delépine). D’autre part, la sexualité, surtout perçue comme un moyen de procréation par les protagonistes.

En effet, le film d’Olivier Babinet nous entraîne dans un univers très légèrement futuriste, dans lequel la vie marine est proche de l’extinction. Les seuls poissons restants sont en aquarium dans un labo, et la dernière baleine, Miranda, arrive en fin de vie. Les plages de Normandie et du Sud-Ouest incarnent ce paysage de sublime désolation, où ne restent que les vagues, le sable et les lumières de bord de mer, sans âme qui vivent sous l’eau, et pas grand monde hors de l’eau non plus.

Car le film se concentre sur une petite ville où les possibilités de rencontres se font rares, au grand dam de Daniel qui souhaite autant obtenir une descendance que voir ses spécimens aquatiques se reproduire également. Que souhaitons-nous laisser de nous sur terre et que sacrifierions-nous pour y parvenir ? Telles sont les questions qui traversent ce long-métrage à la mélancolie poétique, où Nietzsche est un prénom d’axolotl et où l’on guérit la sphère ORL par des semelles orthopédiques. Cet univers de doux dingue fait penser à Perdrix, qui cultivait également le décalage pour faire entrer en collision des personnages un peu perdus qui n’attendaient que de se trouver.

La révélation du film (hormis Nietzsche bien sûr), c’est India Hair, déjà repérée dans Camille Redouble, Une intime conviction et Fleabag mais qui révèle ici un potentiel plus adulte, tout en conservant une adorabilité juvénile qui s’exprime aussi bien dans ses intonations que dans ses mèches roses. Promis, ce n’est pas que parce qu’elle est née saumuroise que j’ai éprouvé autant de tendresse pour le personnage qu’elle compose, qui garde une forme de candeur malgré les épreuves de la vie qui la travaillent la nuit venue.

Ce film conjugue douleur et douceur d’une manière inédite, comme s’il fallait rendre délicat ce qui peut blesser, et envisager le pire sous l’angle d’un monde aux teintes layettes bleues et roses. Le résultat est très particulier, et très réussi.

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