Au départ, il y a Floppy Le Redoux, une figure de sorcière qui a fasciné Mona Chollet enfant. Et puis toutes les représentations de fiction, des contes à leurs versions Disney. Et toutes celles qui ont péri après condamnation dans des procès en sorcellerie…
Impossible de ne pas avoir entendu parler de Sorcières, le best-seller de Mona Chollet, et je me demande même comment j’ai fait pour résister à acheter sur-le-champ un livre portant le sous-titre « la puissance invaincue des femmes ». Je l’avais pourtant offert (à mon patron – j’ai toujours des idées de cadeaux follement inspirées et appropriées) mais il a fallu que Chez soi contribue à ma révolution mentale du confinement (n’ayons pas peur des grands mots) pour que je me jette sur les autres ouvrages de l’autrice.
Je craignais un peu de relire les mêmes éléments que dans Le complexe de la sorcière d’Isabelle Sorente, que j’avais trouvé très fort et très documenté, mais finalement les deux ouvrages sont assez complémentaires. Même si les sorcières et les chasses qu’elles ont subies sont le point de départ de l’essai de Mona Chollet, les références historiques sont relativement limitées. Le cœur du sujet, ce n’est pas tant la figure de la sorcière de la fin du Moyen-Âge et de l’époque moderne, mais plutôt l’héritage de cette tradition que la société des hommes a voulu éradiquer. D’où un découpage par chapitres thématiques, abordant l’indépendance féminine, le choix de ne pas avoir d’enfants, la question du vieillissement et enfin une réflexion sur la possibilité d’inverser les tendances.
La plume de l’autrice est toujours aussi alerte, facile à suivre, décryptant son sujet avec clarté, humour et sincérité, n’hésitant jamais à dire « je » ni à dévoiler ses questionnements même quand ceux-ci ne trouveraient pas de réponse claire (c’est évidemment le plus intéressant). Elle s’appuie sur des références historiques et culturelles, parmi lesquelles des essais que l’on a envie de se procurer dans la minute tant elle en parle bien, et des films, en particulier dans la partie sur le vieillissement au féminin, ce qui n’a pas été pour me déplaire.
Je n’ai pas forcément eu l’impression que le livre m’apprenait beaucoup de choses, car il ne s’agit pas d’en mettre plein la vue en alignant les connaissances, mais plutôt d’un agréable compagnonnage pour mes réflexions féministes. À cet égard, c’est sans nul doute la partie sur l’essentialisme et la rationalité qui m’a plus nourrie. Les femmes sont-elles plus proches de la nature et les hommes plus rationnels ? Mais d’abord qu’est-ce que la rationalité, est-elle nécessairement mathématique et chiffrée ? (Une réflexion qui d’ailleurs renvoie aux différentes formes d’intelligence dont on rappelle que seulement deux sont particulièrement valorisées dans le cursus scolaire.)
Ce qui transparaît encore et encore dans chaque angle du problème abordé, c’est la capacité de nuisance du patriarcat et de ses avatars (l’Église, la médecine, la science, le pouvoir…) qui n’ont de cesse de brimer tout ce qui les dépasse (la Nature, les croyances intimes, l’indénombrable, le féminin…). Par sa limpidité, sa facilité d’accès, son ancrage très concret dans des thématiques de nos vies quotidiennes, Sorcières apparaît comme une excellente porte d’entrée dans la réflexion féministe. On ne peut donc que se réjouir de son succès en librairie, en espérant qu’il ait fait avancer beaucoup de femmes… et pourquoi pas d’hommes aussi !
Je l’ai adoré, trouvé très abordable et très agréable à lire ! Très inspirant et de bonnes pistes de réflexions pour les hommes aussi, j’adore l’idée que tu l’es offert à ton patron !! =)
Haha merci, il l’a pas encore lu cela dit !