François Foucault, prof agrégé de lettres au lycée Henri IV, se retrouve après un mot maladroit muté dans un collège de banlieue pour une mission d’un an…
J’avais depuis sa sortie envisagé de voir ce film, car je m’intéresse toujours aux œuvres autour du milieu scolaire, ce qui ne vous aura probablement pas échappé. Mais si je fais assez confiance aux histoires d’enseignant(e)s en école primaire, dont le quotidien est généralement restitué avec acuité et tendresse par le cinéma français (dans Primaire ou Un beau dimanche par exemple), je me méfie un peu plus des représentations de l’enseignement au collège ou au lycée, avec les clichés inhérents aux différents univers (la banlieue, les élites…). J’avais un peu peur que le film d’Olivier Ayache-Vidal ne soutienne pas la comparaison côté élite avec le très radical et dérangeant L’heure de la sortie et côté banlieue avec le très vécu et sensible La vie scolaire.
De fait, Les grands esprits est davantage dans la veine de La lutte des classes, la comédie sur fond social de Michel Leclerc et Baya Kasmi. Sauf qu’ici on ne se place pas dans la peau des parents mais dans celle d’un enseignant qui se retrouve transfuge de classe. Celui-ci est incarné par Denis Podalydès et c’est la grande chance du film. L’abattage et l’expérience du sociétaire de la Comédie-Française lui permettent de porter toute l’intrigue sur ses presque seules épaules, et de réussir à rendre crédible et presque attachant un personnage pourtant écrit comme un cliché. J’ai absolument détesté la scène d’ouverture qui présente le professeur d’Henri IV en train d’humilier et rabaisser tous ses élèves en leur rendant des copies. Il est aisé de se faire cette image des grands lycées parisiens, mais moi qui y ai passé trois années de classe préparatoire, je suis agacée par ces facilités qui ne reflètent pas la réalité de l’enseignement dispensé ni de l’état d’esprit global (je ne nie pas que certain(e)s enseignant(e)s puissent avoir des attitudes hautaines de ce genre mais la généralisation n’est pas une preuve de finesse ni d’esprit d’analyse).
Une fois arrivé dans son nouvel établissement, l’attitude de François change un peu, et le film s’attendrit, devenant assez drôle et sympathique. Les personnages d’enseignant(e)s restent assez caricaturaux avec le couple mal assorti Chloé (Pauline Huruguen en prof de bonne volonté mais dépassée) et Gaspard (Alexis Moncorgé, en cynique qui méprise ses élèves) mais paradoxalement, les jeunes sont beaucoup plus doux qu’on aurait pu s’y attendre. La réalité d’un collège de banlieue, ce n’est pas un conseil de discipline pour avoir dit « lâche-moi » à son prof, mais plutôt étouffer des affaires de machette dans un cartable ! Bénéficiant donc de la gentillesse de gamins bordéliques et flemmards qui manquent de codes et de cadrage mais pas tellement de curiosité, le film s’appuie sur le jeune Abdoulaye Diallo, lumineux dans les facéties de son personnage d’ado romantique, pour emporter l’adhésion.
Sur le fond, on manque quand même de ce que La vie scolaire mettait bien en lumière : le fait que le collège est le lieu où tous les problèmes venus de l’extérieur se confrontent et se heurtent à la nécessité d’apprendre et d’étudier. Ici, on ne sait pas si les élèves ont l’estomac vide, sont menacés de mariage forcé au bled ou entassés à 8 dans un studio. Et le résultat est forcément édulcoré, pour préserver la tonalité policée et légère du film. Nul doute que le grand public pourra passer un bon moment devant ce choc des cultures calibré, mais il ne faut pas s’y laisser leurrer sur la réalité.
J’ai beaucoup aimé la démonstration sur la littérature et la lecture (bien sûr) avec Denis Poladyles en parlant des Misérables……. Tout est dans la manière de présenter les choses 🙂
Oui la scène du cours sur les Misérables façon faits divers est chouette !
J’allais parler de ce film sur Twitter à cet instant et je suis d’accord avec toi. Sympathique mais creux et facile !
Héhé parfois on est d’accord quand même !