Griff a 28 ans, et du mal à s’intégrer dans une vie normale. Ses collègues se moquent de sa vision du monde un peu naïve, et encore, ils ne savent pas que la nuit, il devient un super-héros pour aider la police à combattre le crime…
C’est grâce aux cadeaux de la plateforme Outbuster (qui, je le rappelle, met en ligne un film indépendant gratuit chaque jour durant le confinement) que j’ai découvert ce film australien dont je n’aurais probablement jamais entendu parler dans d’autres circonstances. Moi qui n’aime pas du tout les histoires de super-héros et de pouvoirs magiques, je ne sais pas pourquoi j’ai été attirée par ce film, probablement parce qu’il promettait un traitement un peu décalé du sujet.
Le film commence sous les atours d’un vrai blockbuster du genre, mais en version un peu cheap. Nous avons bien un super-héros dans un costume moulant aux muscles redessinés, qui combat les injustices la nuit et, le jour, fait profil bas en passant pour un petit employé de bureau. Griff (Ryan Kwanten) cache son identité secrète à tous, y compris à son frère Tim qui s’inquiète de ses secrets. On retrouve chez lui certains éléments propres aux héros classiques : un panel d’écrans lui signalant les crimes en cours, des costumes cachés dans un placard qu’il endosse en un éclair pour aller secourir la veuve et l’orphelin… Mais quelque chose cloche.
Et peu à peu, le film se déroule en jouant sur la frontière entre réel et imaginaire. En rencontrant la nouvelle copine de Tim, Melody (Maeve Dermody, qu’on pourra bientôt voir dans Le jardin secret), Griff se retrouve confronté à un dilemme : partager ou non son secret avec celle qui pourrait devenir une alliée ? Car plus que la possible romance, ce qui importe entre eux, c’est la possibilité d’être enfin pleinement soi-même face à autrui.
Même si l’univers créé par Leon Ford, qui passe ici à la réalisation, fait penser à un Batman au rabais dans son esthétique très noire et jaune, dans l’intention on est plus proche du film de Brie Larson, Unicorn Store : le super-héros incarne la part d’enfance et de croyance en un au-delà du réel avec laquelle il faut transiger pour devenir un adulte responsable. Les effets spéciaux bricolés et les expériences improbables de Griff et Melody s’inscrivent de fait assez bien dans cet arc narratif, qui réfléchit beaucoup moins aux valeurs défendues par un justicier et à ses actions qu’à ce que signifie de s’identifier comme tel. Est-on celui ou celle que l’on décide d’être, ou ce que les autres voient et disent de nous ? Une question existentielle commune qui se pare ici d’une fantaisie poétique façon MacGyver lunaire, pour un petit film à l’image de ses personnages : pas comme tout le monde, certes imparfait, mais muni d’une originalité et d’une candeur qui font son charme.
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