À Newcastle, Ricky achète un camion pour devenir livreur franchisé. Pour cela, il doit vendre la voiture de sa femme, qui est aide-soignante à domicile. Ils peinent à joindre les deux bouts et leurs enfants en pâtissent…
J’attendais avec impatience le nouveau film de Ken Loach, qui s’annonçait bien dans la veine du bouleversant Moi, Daniel Blake, l’une des plus belles Palmes d’Or. Je ne vous cacherai pas que j’étais déjà très émue au démarrage du film, encore bouleversée par les propos inspirants tenus par Ken Loach et son scénariste Paul Laverty venus présenter le film.
Paul Laverty a expliqué que pour réussir un scénario, l’important était d’être capable de rencontrer les gens et de les écouter raconter leur vie, ce qui donne de bons sujets. Pour ce film, comme pour Moi, Daniel Blake, les deux hommes sont allés à la rencontre de gens modestes, ont discuté de leurs conditions de vie et de travail, de leurs difficultés quotidiennes. Une fois encore, pour raconter leur histoire à l’écran, ils ont choisi des inconnu(e)s qui n’avaient pour la plupart jamais joué. Le résultat ? Un film extrêmement humain et criant de vérité.
Kris Hitchen, qui a exercé des emplois divers dans la vie, incarne à la perfection ce père de famille qui fait tout ce qu’il peut pour offrir à sa femme et ses enfants la maison dont ils rêvent. Mais chaque effort supplémentaire semble voué à l’éloigner de ce rêve de propriétaire. C’est là tout le talent du réalisateur : on pressent, d’emblée, que tout va mal tourner. Tout l’enjeu est de savoir comment et jusqu’à quel point la machine va broyer ces gens pleins d’espoir et de bonne volonté.
Si le thème premier du film est l’ubérisation du travail, les conséquences terribles vont jusqu’à la sphère familiale. Le rapport de couple est interrogé mais surtout celui entre parents et enfants. Debbie Honeywood compose un personnage de mère investie, attentive et douce, qui fait preuve de ces mêmes qualités empathiques dans son travail auprès des personnages âgées ou en situation de handicap. Mais tout comme son mari, elle peine à trouver du temps à accorder à leurs enfants, la petite Liza Jane dont la fraîcheur est le souffle d’air qui fait respirer les spectateurs/trices et Seb, l’ado en pleine rébellion qui a de quoi agacer par son inconséquence jusqu’à ce qu’il révèle ses capacités affectives.
Documenté, vivant, tendu, le film nous tient en haleine et peu à peu l’angoisse nous étreint. À mesure que l’étau se resserre autour de Ricky et des siens, la révolte le dispute à la tristesse et nous nous interrogeons : quand cela va-t-il finir ? Jusqu’à quel degré de drame faudra-t-il parvenir pour qu’enfin le système lâche la bride de ce couple dépassé ? C’est fort, bien écrit et mis en scène au cordeau, et ça pose des questions nécessaires. Trois ans après sa deuxième Palme, le cinéaste prouve qu’il n’a rien perdu de son acuité sociologique ni de son humanité. Le cinéma social a encore de beaux jours devant lui, et pour cela, on a envie de dire à messieurs Loach et Laverty : merci.
Je déteste ce genre de film, non pas parce qu’ils sont mauvais – bien au contraire – mais parce que je vis avec eux cette détresse qui est dans leur vie dans le film. C’est cruel et dur, comme la vie. Ken Loach est un très grand réalisateur, un de mes préférés. Des oeuvres comme Kes, Le vent se lève ou Jimmy’s hall sont gravés dans mon ptit coeur, je les tiens au chaud contre moi. Super article sur le réalisateur des oubliés =)
Merci pour ce partage d’émotions. J’ai moins accroché à Jimmy’s Hall et j’ai beaucoup de lacunes dans la filmo de Loach et Laverty mais Moi, Daniel Blake avait été un tel choc ! Effectivement ces films brisent le cœur mais en même temps ça fait du bien de voir des artistes employer leur talent et leur énergie à faire réfléchir leurs contemporains et à tenter d’ouvrir les yeux des puissants.
Il m’intrigue ce film !
Si tu as l’occasion de le voir, il est vraiment fort !