Salomé revient dans le village où elle a vécu un an à l’adolescence. Son job pour l’été : gardienne de la déchetterie. Elle voit débarquer Jess, une participante égarée d’une télé-réalité, puis rencontre des habitants locaux…
Présenté dans le cadre de l’ACID Cannes 2019, ce film me faisait de l’œil surtout grâce à la présence de Salomé Richard, l’actrice belge que j’avais découverte dans Baden Baden il y a deux ans. Et de fait, le long-métrage d’Alain Raoust n’est pas si éloigné du chouette film de Rachel Lang. On y retrouve Salomé Richard dans le rôle d’une jeune femme paumée, qui ne sait pas trop quoi faire de sa vie et que les rencontres inattendues vont amener à évoluer et à se trouver.
Mais ici, l’ambiance est un peu différente. Seule d’abord dans la déchetterie écrasée par la canicule, Salomé découvre les lieux et les objets laissés par l’ancien gardien. Il y a une aura d’un mystère un peu foutraque et révolté qui vire à l’atmosphère de western quand Jess (Estelle Meyer) fait irruption avec sa colère et ses injures, quand une chienne passe comme une ombre la nuit en quête de son maître, que la propriétaire des lieux ne répond pas au téléphone et qu’une rencontre d’un soir avec deux garçons du coin a des répercussions inattendues.
Au-delà du décor de bric et de broc qui peuple aussi bien la déchetterie que la coloc de Salomé, sa sœur et leurs amis, on a parfois une impression de coq à l’âne au fur et à mesure que les personnages décalés se succèdent aux côtés de Salomé. Mais qu’est-ce qui unit la candidate d’un jeu télé qui rêve de cours de chant, le jeune homme perché sur son quad qui tente de faire le deuil de son frère ZADiste, ou le cycliste désabusé prêt à se mettre lui-même à la casse ? La quête d’un but qui semble leur échapper, et dont l’absence remplit leur vie de colère et de rancœur. Cette jeunesse a finalement bien moins de rêves, en apparence, que de déceptions avalées de travers, d’angoisses de l’échec et de réflexes de ruades face aux sentiers battus. Salomé, Clément (Hans Zimmer), Jessica, le cycliste (Jacques Bonnaffé), la mère de Clément (Christine Citti), tous tiennent au fond des discours assez proches dominés par des sentiments négatifs, l’impression de ne pas trouver leur place dans la société, ce qui les conduit, symboliquement, parmi les rebuts de la déchetterie.
Sous des aspects de chronique estivale, et en dépit du traitement de thème plus intimes comme le deuil, Alain Raoust propose avant tout un film politique bien dans l’air du temps. Tous les protagonistes auraient pu enfiler un gilet jaune dans la France de 2019, tant leur volonté de « tout faire péter » est ressassée dans le film. Ce manque d’espoir finirait par devenir oppressant pour les spectateurs/trices s’il n’y avait une fin un peu téléphonée mais qui a le mérite de proposer une alternative à la violence sous-jacente qui menaçait d’exploser.