Centerville, USA. Les montres s’arrêtent, la radio se brouille, les infos annoncent que la fracture des pôles a modifié l’axe de la Terre. Une nuit, les morts commencent à se réveiller…
C’est sans attentes que je suis allée voir The Dead Don’t Die, et uniquement par curiosité pour le film d’ouverture du 72e Festival de Cannes (tout en ayant en tête la déception globale des films cannois de l’an dernier). Jusqu’ici, on ne peut pas dire que ce que j’avais vu du cinéma de Jarmusch m’eût emballée : j’avais trouvé Only lovers left alive assez vain et prétentieux et Paterson poétique mais ennuyeux.
Je n’ai pas une grande expérience des films de zombies, en revanche j’ai été familiarisée avec ces créatures par les premières saisons de The Walking Dead. Ici, la figure des zombies ne m’a pas semblé particulièrement novatrice : on est face à des morts-vivants qui s’extirpent des tombes et recherchent la chair humaine, qui sont caractérisés par leur lenteur dans les déplacements, leur tendance à se grouper et le fait que la seule façon efficace de s’en débarrasser soit de viser la tête (« kill the head »).
Ultra référencé, le film se pose comme un hommage à Romero, auquel il emprunte clairement la critique de la société consumériste contemporaine (qui date du Zombie de 1978) : les zombies de Jarmusch, en plus des humains à manger, sont aussi attirés par ce qui les passionnait de leur vivant, ce qui lui permet d’appuyer sur les addictions du XXIe siècle telles que les smartphones, le café ou les antidépresseurs. Le personnage de Bob l’Ermite (Tom Waits) fait figure de voix de la sagesse face aux comportements des humains « civilisés » vivants et morts qui finissent par se confondre.
On a vraiment l’impression que le réalisateur s’est amusé à faire ce film, qui souffre du travers habituel de Jarmusch (on a tendance à s’ennuyer) mais a ici un grand avantage tout de même : on s’amuse aussi. Je trouve que la comédie se marie bien au goût des symboles qui caractérise le réalisateur. Au fond, que les personnages soient à peine esquissés psychologiquement, cela a fort peu d’importance quand il s’agit de les utiliser comme des marionnettes pour nous divertir. Retrouvant une grande partie des habitués de ses films (Tilda Swinton, Bill Murray, Adam Driver en tête), le cinéaste se sert d’eux pour monter un film bien plus drôle qu’effrayant et très volontiers méta dans son humour. Je n’ai pas boudé mon plaisir devant le comique de répétition (en particulier avec la chanson « The Dead Don’t Die ») ni devant l’attitude détachée de Ronnie qui prévient que tout va mal finir dès les premières minutes du film. Mais à force, comme souvent, le réalisateur a tendance à en faire trop, en particulier autour du personnage de Tilda Swinton, pourtant probablement le plus intéressant pendant une bonne partie du long-métrage.
Sans révolutionner le genre, The Dead Don’t Die s’inscrit assez honnêtement dans la lignée des films de zombies incriminant notre modèle sociétal. Sans mériter la Palme, le film m’aura tout de même fait rire et davantage convaincue que les précédents du réalisateur.