Michka vieillit et doit aller habiter en maison de retraite. Marie, dont elle s’est occupée enfant, vient souvent la voir, de même que Jérôme l’orthophoniste, qui l’aide à lutter contre l’aphasie…
Cela faisait un moment que je n’avais pas lu de roman de Delphine de Vigan. Le dernier, c’était Rien ne s’oppose à la nuit, et même si j’en ai parlé ici récemment, la lecture datait déjà d’un an ou deux.
J’ai laissé passer D’après une histoire vraie et Les loyautés, qui pourtant m’intéressaient sur le papier. Mais je garde de cette autrice le souvenir de lectures qui m’ont souvent laissée un peu sur ma faim, à l’exception de No et moi.
Mais le titre de celui-ci me parlait vraiment. La gratitude, c’est un sentiment qui me tient à cœur, et en chroniquant ici les films et livres que j’ai aimés, c’est probablement ce que j’essaie d’exprimer, en tentant de leur rendre un peu, par mes mots, de ce qu’ils m’ont donné à vivre
Le récit nous offre les points de vue de Marie, Jérôme, et Michka dont les mauvais rêves nous sont livrés au fil des pages. À travers l’alternance des voix de Marie et Jérôme, c’est un portrait croisé de Michka qui s’esquisse. Un portrait paradoxal : alors que la femme âgée perd les mots pour s’exprimer, c’est grâce aux mots des narrateur/trice que nous apprenons à la connaître, qu’elle devient vivante pour nous qui lisons. Comme dans Se souvenir des jolies choses, le récit interroge la capacité à vivre quand on perd la possibilité de communiquer avec les autres. Ici, ce n’est pas la mémoire qui s’enfuit de Michka, mais le langage. Le résultat est le même : le temps qui passe la coupe peu à peu du monde extérieur, inexorablement.
Le récit prend alors la forme d’un contre-la-montre pour, avant qu’il ne soit trop tard, que toutes les gratitudes soient exprimés : celle de Marie envers Michka, celle de Michka envers des personnes perdues de vue de longue date mais auxquelles elle doit la vie. Et Jérôme alors ? Il faudra attendre la fin du roman pour comprendre ce pour quoi il peut dire merci.
Bouleversant mais toujours doux, le récit nous attache fort à ces trois personnages d’une grande bienveillance. Il nous serre le cœur mais l’emplit en même temps d’émotion, de joie aussi, de sourires face aux expressions truculentes de Michka.
Et puis, en filigrane, à travers la beauté de ces relations interpersonnelles, comme dans No et moi, ce sont les échecs de notre société que Delphine de Vigan pointe du doigt. L’empathie de Jérôme envers Michka, c’est ce que le personnel de certaines maisons de retraite se plaint de n’avoir plus le temps et les moyens de ressentir.
Tout en délicatesse et en simplicité, ce livre qui se dévore m’a énormément touchée, et est sans conteste mon préféré de cette autrice, dont j’apprécie décidément beaucoup plus qu’elle dépeigne des relations positives et lumineuses que problématiques.
J’avais beaucoup aimé D’après une histoire vraie, Goncourt des lycéens l’année où j’ai participé, et Rien ne s’oppose à la nuit m’avait beaucoup déçue… tu m’as donné envie de lire Les gratitudes en tout cas !
Il faudra que je lise « D’après une histoire vraie » un jour quand même !
Ouiii ! Et le film n’est pas mal du tout non plus, même si j’ai préféré le livre 😉
Ah Rien ne s’oppose à la nuit et D’après une histoire vraie sont deux claques pour moi, Les loyautés ma laissé sur ma faim et j’ai hâte de lire celui-ci !
Il faut vraiment que je lise « D’après une histoire vraie », tout le monde m’en dit du bien !
Bon bon j’ai hâte que tu me le prêtes 😀 😀
Ah zut pour l’instant ce sont mes parents qui le lisent, j’irai le récupérer fin mai.