« My beautiful boy » : le monstre dans les veines

affiche-film-my-beautiful-boyDavid Sheff est prêt à tout pour aider Nic, son fils de 18 ans devenu accro à la meth. Il rencontre des spécialistes et place Nic dans une cure de désintoxication…

Movie challenge 2019 : un film qui aurait dû avoir un Oscar 

J’ai attendu ce film pendant des mois avec des espoirs grandissants. Après mon infini coup de cœur pour Call Me By Your Name, j’ai commencé à suivre de près la carrière des interprètes du film de Luca Guadagnino, et j’ai donc su très vite que l’un des projets à venir de Timothée Chalamet était ce film de Félix Van Groeningen.

J’avais gardé d’Alabama Monroe, le seul film du réalisateur belge que j’avais vu jusque-là, le souvenir d’un long-métrage emberlificoté dans ses flashbacks, mais pourtant beau, et surtout extrêmement triste et pessimiste. J’avoue avoir un peu craint que Beautiful Boy ne souffre d’un montage aussi compliqué et d’un côté excessif.

En même temps, je ne pouvais que m’enthousiasmer devant les premières images (la photographie est magnifique), puis les retours américains élogieux. Heureusement que j’ai eu la possibilité de découvrir le film début décembre en projection presse grâce à Mensch Agency et Metropolitan Filmexport car mon impatience était à son comble et février semblait loin.

Si le montage se permet quelques flashbacks, je l’ai trouvé globalement beaucoup plus sage et maîtrisé que dans Alabama Monroe. C’est comme si Felix von Groeningen avait mûri sa technique et sa capacité à insuffler des émotions fortes au spectateur pour produire une œuvre équilibrée entre moments de lumière, fulgurances de vie, noirceur, mélancolie, espoirs et rechutes, amour familial et solitude existentielle. Sans manichéisme, sans édulcorer la réalité ni se complaire dans le voyeurisme, probablement aidé dans la justesse du ton par son matériau premier, les livres-témoignages des réels protagonistes de cette histoire vraie, David et Nic Sheff, Beautiful Boy retrace leur double combat.

À l’écran, le tandem père-fils Steve Carell-Timothée Chalamet est bouleversant sans trop en faire. Leurs deux performances sont impressionnantes et auraient clairement mérité des nominations aux Oscars. Carell était déjà un père touchant dans Crazy, Stupid, Love. mais il atteint ici un niveau de finesse de jeu supérieur. L’amour sans limite qu’il porte à son enfant (à ses enfants, d’ailleurs, même si l’accent est mis sur la relation avec son aîné), exprimé par le gimmick « everything », le porte dans les périodes de doute face à l’addiction de Nic. Cette résistance puisée dans les moments forts de leur relation est retranscrite avec délicatesse par la présence de flashbacks lumineux avec Nic enfant et ado (j’en profite pour souligner que les acteurs qui incarnent Nic à différents âges sont vraiment bien choisis). Face à lui, Timothée Chalamet est un choix parfait pour donner vie à ce jeune homme à la fois doux et aimant envers sa famille, doté d’une grande sensibilité qui s’exprime par des écrits et des dessins, mais aussi terrassé par l’addiction qui le rend agressif, renfermé et capable de mentir et détruire toute relation avec ses proches. Il y a quelque chose d’à la fois tragique et porteur d’espoir dans ce tandem qui s’épaule et se déchire, la silhouette de funambule ivre du fils et celle d’homme solide mais accablé du père.

Ode à l’amour paternel, le film n’en oublie pas pour autant les figures féminines : la mère (Amy Ryan) et la belle-mère (Maura Tierney), toutes deux également justes et touchantes bien qu’en arrière-plan.

Plus qu’une simple narration inspirée de faits réels, Beautiful Boy m’est apparu comme une vraie expérience de cinéma, tant intellectuelle (le poème final de Bukowski au générique a de quoi donner à réfléchir) que sensorielle. Les expériences liées à la drogue donnent lieu à des plans alliant sons, lumières, couleurs, effets de flou, de façon à la fois onirique et réaliste (me semble-t-il, car je n’ai aucune expérience de la question). La bande-son planante, qui sait parfois se faire explosive ou délicate (comme avec la berceuse de Lennon qui donne son titre au film), accentue l’effet immersif pour le spectateur.

Sans jugement mais avec bienveillance et empathie, Beautiful Boy accompagne ses personnages dans leur errance, et plonge le spectateur au cœur de son sujet. Une expérience qui peut conférer à l’épiphanie et ne laissera pas forcément indemne.

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13 commentaires sur “« My beautiful boy » : le monstre dans les veines

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  1. J’ai beaucoup aimé ce film très juste, tout en finesse. Moi aussi j’ai découvert Timothée Chalamet dand Call me by your name et moi aussi j’ai eu envie de voir My beautiful en partie pour lui. Je n’ai pas été déçue le moins du monde et la douceur de Steve Carell apporte vraiment quelque chose : le tandem marche a la perfection et le rendu est bouleversant sans être insupportable (mon avis ici :https://pamolico.wordpress.com/2019/02/10/les-demons-dune-gueule-dange-my-beautiful-boy-felix-van-groeningen/ 🙂 )

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