Ava, treize ans, est en vacances dans les Landes avec sa mère et sa petite sœur. C’est l’été, le dernier avant que la maladie ne la rende aveugle. Ava décide de s’endurcir et de se tester pour se préparer…
Je n’avais pas spécialement repéré ce film, si ce n’est pour son affiche magnifique. Mais lorsque j’ai voulu profiter de la Fête du cinéma, par élimination, c’est sur le long-métrage de Léa Mysius que mon choix s’est porté, après en avoir découvert la bande-annonce.
Ce n’est pas un hasard si j’emprunte à Cœur de pirate le titre de cet article (extrait de la chanson « Ava »). Car la petite Ava du film tient elle aussi du pirate, avec son foulard rouge noué en bandeau sur les yeux, et son bâton en guise d’appui, comme une jambe de bois supplémentaire. Je pourrais parler sur tout une page d’Ava et de son interprète, Noée Abita, dont c’est le premier rôle mais certainement pas le dernier. On retrouve chez elle une moue boudeuse qui rappelle Adèle Exarchopoulos dans La vie d’Adèle, avec quelque chose de plus grave et profond dans le regard. Indépendamment de ses problèmes de vue, qui au début transparaissent essentiellement dans ses cauchemars (assez horribles d’ailleurs, représentés façon film d’horreur), Ava est une adolescente particulière. On sent chez elle une intensité, un caractère d’animal farouche, qui tantôt se masque derrière une courtoisie feinte envers sa mère, tantôt s’exprime dans des élans de cruauté ou d’enfantillages. Le travail physique de la jeune comédienne est assez impressionnant : habillée, Ava a vraiment l’air d’une petite fille (et jusque dans sa voix et ses expressions), mais dès l’instant où elle se dénude, seule sur la plage, c’est une jeune femme que nous voyons éclore.
Film d’apprentissage, c’est d’ailleurs sans doute le qualificatif qui correspondrait le mieux à ce premier long-métrage ambitieux et hybride : tantôt solaire, tantôt sombre, le film oscille entre moments de grâce et obsession pour la médiocrité, incarnée par la mère d’Ava (Laure Calamy, qu’on ne regrette pas d’avoir découverte dans Dix pour cent). Immature, égocentrique, à fleur de peau, Maud voudrait faire de sa fille une alliée et une confidente pour ses péripéties amoureuses. Mais c’est seule que la jeune fille a besoin de faire le deuil de sa vision, en essayant de tout voir avant qu’il ne soit trop tard, ou du moins de voir autre chose que la « laideur » de son quotidien. D’où sa fascination pour le chien Loupo, couleur de nuit, puis son propriétaire, un jeune gitan qui traîne sur la plage.
Léa Mysius revisite le film de premières fois avec une vraie patte de réalisatrice, appuyée par une photographie remarquable et rehaussée d’une bande-son aussi excessive que sa jeune héroïne. Mention spéciale pour le morceau « Sabali » d’Amadou et Mariam qui accompagne l’une des plus belles images, le dernier élan d’enfance d’Ava. L’autre grand moment du film, c’est la scène dont est issue l’affiche du film, qui offre des plans époustouflants dans les dunes et marque le lâcher-prise d’Ava, prête à tout pour suivre finalement le conseil de sa mère de faire de cet été le plus beau de sa vie, quelles qu’en soient les conséquences.
Très emballée au milieu du film par le côté conte initiatique et romance plus ou moins malsaine, je l’ai été un peu moins par le détour vers le thriller de la dernière partie, et je dois avouer que la chute m’a laissée sur ma faim. J’aurais voulu savoir ce qu’il allait advenir ensuite, mais j’imagine que cette solution permet à chaque spectateur de choisir d’orienter lui-même le film plutôt vers l’ombre ou vers la lumière.
L’affiche est effectivement magnifique ! Encore un film que je rajoute à ma wishlist, je suis fort intriguée 🙂
Youhou ! Je pense qu’il pourrait te plaire.