Adèle et Hugo ont toujours vécu dans un monde où l’écrit est prépondérant. Mais lorsqu’elle donne naissance à Nino, Adèle décide de le protéger de cet héritage littéraire qu’elle juge dangereux. Alors que les livres disparaissent, elle élève son fils dans l’amour et la musique.
Tombée par hasard sur la couverture de Rien que des mots, j’avais été séduite par le résumé de ce roman publié par les Éditions François Bourin, que je découvre avec ce livre. C’est pourquoi je me suis plongée dans le récit avec une grande curiosité.
J’ai beaucoup aimé la réflexion sur le pouvoir des mots et de la lecture et sur l’impact que cette activité peut avoir sur le développement d’un enfant. Fervente lectrice depuis mon plus jeune âge, j’ai toujours considéré qu’il était extrêmement important de familiariser les enfants avec l’écrit. C’est pourquoi cela m’intéressait de découvrir un point de vue opposé à travers ce récit. Si Adèle a si peur des mots, c’est parce qu’elle connaît le revers de la médaille : fille et épouse d’auteurs de fiction, elle est elle-même journaliste. Cela fait du bien de voir des écrivains au travail dans ce livre, de montrer à quel point l’écriture peut prendre une place capitale dans leur vie, leur imposer la solitude, les horaires décalés et un mode de vie difficile à concilier avec un rythme familial normal. J’ai trop souvent entendu des considérations associant certains auteurs à des « people » ou des « fainéants » et les descriptions d’Adeline Fleury, peut-être un peu extrêmes, ont au moins le mérite de faire réfléchir sur la discipline des auteurs. Par ailleurs, les premières pages acerbes sur le journalisme m’ont bien plu, le « burn-out » du journaliste me rappelant la sortie de Jim Carrey dans Bruce tout-puissant.
Si on peut penser au début du roman que le cadre est celui de notre monde, on se rend compte petit à petit que les évolutions ne cadrent pas avec la réalité historique. L’univers dépeint par Adeline Fleury est plutôt une sorte de réalité parallèle, un double sombre de notre société déjà très connectée où les écrans auraient définitivement pris le pas sur tout autre loisir et moyen de communication. C’est un milieu assez anxiogène et malsain qui se déploie dans le livre, ce qui peut parfois mettre le lecteur mal à l’aise mais permet aussi des scènes assez poétiques qui m’ont rappelé l’univers de Mathias Malzieu (notamment Maintenant qu’il fait tout le temps nuit sur toi).
L’auteur a un vrai univers mais aussi un style assez particulier, avec un usage un peu flou de la ponctuation et quelques coquetteries syntaxiques qui m’ont laissée un peu perplexe. Le texte est par moments saturé de références littéraires, utilisées parfois sur un ton iconoclaste qui ne m’a pas vraiment convaincue. De plus, même s’il est précisé que Nino se comporte comme un adulte, j’ai trouvé qu’il s’exprimait et réfléchissait de manière vraiment trop mûre pour son jeune âge (d’ailleurs sa mère s’adresse à lui comme à un adulte miniature). Cependant, ce sont des parti-pris qui pourront séduire, tout dépend des goûts du lecteur : je reconnais que pour ma part je m’attache vraiment aux émotions et aux personnages, et que si je remarque trop les particularités d’un style, je les considère comme un obstacle.
Ce roman n’en reste pas moins une histoire intéressante avec un beau sujet, traité de manière originale et avec intensité. Une découverte hors des sentiers battus.
Je le note car je trouve le sujet intéressant :). Merci pour cette revue !
De rien ! Je guetterai ton avis. 🙂
En effet intéressant, ça ferait peut-être un meilleur film.
Sur le langage, qui promet d’être intéressant, si j’arrive un jour à l’atteindre dans ma playlist de livres, Epépé de Ferenc Karinthy (que j’ai pas encore vu dans la bibliothèque rouge si je ne m’abuse).
Plus d’infos ici : http://www.zulma.fr/livre-poche-epepe-572079.html
Je ne connaissais pas Epepé tiens ! 🙂