« À trois on y va », vaudeville futé du XXIe siècle

à trois on y vaMélodie, jeune avocate lilloise, est amoureuse de Charlotte, sa meilleure amie. Mais Charlotte vit déjà en couple avec Micha, assistant vétérinaire. Or celui-ci avoue à Mélodie qu’il n’est pas insensible à son charme, une attirance qui se révèle réciproque…

J’ai déjà chanté sur tous les tons sur ce blog mon admiration pour certains acteurs tels que Pio Marmaï ou Kristin Scott Thomas. Il me faut ajouter à mon panthéon personnel de comédiens dont je suis devenue inconditionnelle la pétillante Anaïs Demoustier. Depuis que je l’ai découverte en jeune femme paumée dans D’amour et d’eau fraîche, je l’ai autant appréciée dans l’adaptation de La Joie de vivre pour la télévision que dans Quai d’Orsay. Cette actrice a un don peu commun : tête d’affiche ou second rôle, elle irradie d’une lumière tout en finesse et distille son jeu frais et spontané. Au point qu’on finisse par oublier qu’on l’a déjà vue ailleurs pour ne plus observer que son personnage, tellement vrai et vivant.

Ici, Mélodie se retrouve dans une situation amoureuse compliquée, tiraillée entre sa passion amicale et charnelle pour la mystérieuse Charlotte et sa complicité teintée de culpabilité envers l’adorable Micha. En allant voir le film de Jérôme Bonnell, je m’attendais à un bon film français sur les relations humaines comme je les aime. Mais je ne pensais pas qu’il serait si drôle ! Les situations vaudevillesques sont très bien gérées et jouent des running gag sans tomber dans la caricature. Les répliques font mouche, les parties de cache-cache dans la maison en rénovation du couple fonctionnent à merveille, et même ce truc éculé de l’échappée par la fenêtre fait encore son petit effet.

Le scénario pourrait paraître on ne peut plus classique, et pourtant il devient d’une étonnante modernité lorsque Mélodie précipite la révélation de sa double aventure aux principaux intéressés. C’est alors le phénomène contemporain de « trouple » qui est abordé avec un genre de Jules et Jim inversé. Deux filles, un garçon, qui incarnent avec tendresse et liberté cette génération que le monde du travail n’a pas épargné (les scènes autour de la profession de Mélodie sont assez édifiantes à ce titre et révèlent le malaise relatif à l’entrée dans le monde du travail, qui correspond rarement aux attentes des jeunes idéalistes) et qui, ayant souvent vu leurs parents se déchirer, chérissent à la fois l’idéal du couple romantique et la préservation de leur indépendance la plus absolue.

Comme le disait Oscar Wilde, « le meilleur moyen de résister à la tentation, c’est d’y céder ». Ce pourrait être la devise de nos sympathiques protagonistes, qui apportent crédibilité et fraîcheur au film de Jérôme Bonnell. Outre la charmante Anaïs Demoustier, j’ai particulièrement apprécié le jeu en retenue de Sophie Verbeeck et la maladresse touchante que Félix Moati confère à Micha.

Bref, un très bon moment de rire et d’émotion devant ce film sans prétention qui évoque des questions contemporaines intéressantes. La fin m’a toutefois un peu déçue, j’aurais préféré une prise de position plus audacieuse, qui aurait fait de ce long-métrage agréable une œuvre importante. Tant pis, il reste le plaisir de voir trois talents de la jeune génération d’acteurs français se prêter à un vaudeville réussi.

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